Intempéries dans la Somme : état des lieux et dispositif
Notre département a subi en quinze jours une série d’épisodes orageux et de fortes pluies.
Etat des lieux, dispositif mis en place par les services préfectoraux et actions à venir.
Pluies torrentielles, coulées de boue, dégâts matériels sur les habitations et les bâtiments, parcelles de cultures endommagées… Rien n’a été épargné à notre département. Le 22 mai dernier, alors que la Somme n’est pas placée en vigilance orange, de violents orages éclatent, accompagnés de fortes précipitations et de coulées de boue. Irles, Miraumont, Grandcourt et Cardonnette sont en première ligne. Rebelote dans la nuit du 27 au 28 mai. Cardonnette est de nouveau dans la ligne de mire des épisodes orageux. Naours est sous les eaux, mais aussi Beauval, Doullens, Yonval, Saint-Riquier, Abbeville, etc. Le lundi 29 mai, le département passe en vigilance orange. Dans la nuit, les épisodes orageux se déplacent sur l’est et le sud-est du département. La RN 25 est coupée durant trois heures.
Le 28 mai, le préfet de la Somme décide d’activer le centre opérationnel départemental, où sont réunis tous les acteurs (DDTM, Département, préfecture, Sdis, etc.). Ce dispositif permet de suivre la situation et d’organiser l’intervention des secours et de l’assistance aux populations. Au total, 383 interventions sont
réalisées par les pompiers dans plus de cent communes samariennes pour évacuer terre et gravats charriés par les coulées de boue. Pour exemple, à Naours, il aura fallu trois jours, avec l’appui de la Croix-Rouge, et le renfort de moto-pompes demandées à d’autres Sdis de la région Hauts-de-France pour vider les bassins de rétention à ras-bord. Le préfet informe, par ailleurs, les maires de la possibilité de déclencher des procédures de catastrophe naturelle. Les voiries sont sécurisées. Tout a été fait en temps et en heure. Il n’en demeure pas moins que le département reste vulnérable.
Points de fragilité
Quoi que l’on fasse, la topologie du département est favorable à des épisodes orageux et des coulées de boue. D’une part, en raison de la présence de vallées sèches qui se remplissent avec les orages. D’autre part, en raison de la nature même des sols fragilisés par l’érosion et le ruissellement. Les remembrements ont également apporté leurs points de fragilité, avec l’extension des parcelles.
Sur le plan des pratiques culturales, les cultures de printemps, dont les sols sont nus à cette saison, sont plus vulnérables. «Sans oublier des sillons dans le sens de la pente. Ce n’est pas une bonne idée. Même si nombreux sont les agriculteurs à ne pas faire cela, on en trouve encore trop», précise Cyril Moreau, directeur de cabinet du préfet de la Somme.
Côté urbanisation, de nombreuses zones pavillonnaires sont construites en limite de champ, «ce qui a pour conséquence d’imperméabiliser les sols», ajoute-t-il. Sans compter les garages en sous-sol des maisons, à l’endroit même où les coulées de boue achèveront leur trajet, et les dents creuses dans les communes. Soit une conjonction de facteurs qui expose d’autant le département face à des épisodes orageux ou pluies torrentielles. Alors, que faire pour atténuer ces fragilités ?
Préconisations
Dans le milieu agricole, DDTM et préfecture incitent au replantage de haies, comme à la réalisation de bandes enherbées ou encore à la création de fossés, de mares, de bassins de rétention, mais aussi à des choix de cultures plus en fonction des saisons, à la nécessité d’assurer une aération des sols pour éviter leur imperméabilisation et, bien sûr, à des labours a contrario du sens de la pente. Autant d’aménagements qui existent et se mettent en place dans certains secteurs du bassin versant, sur la base du volontariat, avec les difficultés et réticences que l’on connaît. «Au final, c’est sa terre que l’agriculteur voit partir avec ces intempéries, sans compter l’appauvrissement de son sol. Aussi accepter des haies ou des bandes enherbées sur un à deux mètres dans une parcelle, ce n’est pas faire un sacrifice considérable», commente Cyril Moreau.
Question : face aux réticences et temps perdu, le volontariat doit-il être encore de mise ? Ou bien faut-il passer à l’étape suivante, soit celle de l’obligation pour mettre un coup d’accélérateur ? «Le sujet devrait avancer avec la mise en place, depuis le 1er janvier dernier, de la compétence Gemapi (Gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations) dans les intercommunalités», indique le directeur de cabinet. Là encore, le sujet avance à pas de tortue, notamment pour des questions de financement (cf. L’Action agricole picarde du 11 mai 2018) et l’absence de volonté de la part de certaines intercommunalités à se saisir de cette compétence.
«Il va falloir continuer les efforts et organiser des réunions avec la DDTM, la FDSEA et les intercommunalités pour remettre sur la table les actions à mettre en œuvre par rapport à la prévention des inondations et coulées de boue. Il faut rebattre les cartes», déclare-t-il. Avant de conclure : «Même si l’on sait que l’on n’éliminera pas la menace en claquant des doigts, et que le risque zéro n’existe pas, des aménagements doivent être réalisés pour canaliser l’eau au maximum sur notre territoire.»
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Aléas climatiques : ce qui peut entrer dans le champ de l’assurance
Quels sont les dégâts indemnisables dans le cadre des intempéries, depuis que la procédure «calamité agricole» n’existe plus pour les grandes cultures ?
Les contrats d’assurance récolte multirisque climatique couvrent quinze aléas : grêle, gel, tempête, coup de soleil, excès d’eau, excès d’hygrométrie, excès de température, inondation, sécheresse, manque de rayonnement, pluie violente, poids/excès de neige, tourbillon de chaleur, et vent de sable. Ce dispositif comprend, pour les contrats par bloc de culture, trois niveaux. Le premier est le contrat socle premier niveau de subvention à 65 %, avec un seuil de déclenchement à 30 % (chez Groupama, le déclenchement se fait à 25 % avec des garanties complémentaires, ndlr) et une franchise à 30 %, sur la base du rendement historique et d’un prix assurable selon le barème national. Le second contrat, de deuxième niveau, comprend des garanties complémentaires subventionnables à 45 %, avec une franchise de 25 %, un complément de prix assurable, les frais de resemis et des frais supplémentaires de récolte. Enfin, le troisième contrat, dit de troisième niveau non subventionnable, est construit autour d’un complément de rendement, d’autres franchises (< 25 %) et de la grêle.
Pour les pluies violentes, les dégâts sur culture sont indemnisés si vous avez souscrit l’un de ces contrats. «Quand des pluies violentes s’abattent sur les récoltes, et qu’une croûte se forme sur les sols, cela ne couvre pas la franchise, mais on peut intervenir au titre de la multirisque pour les frais de resemis ou autres frais complémentaires tels que le rebuttage des pommes de terre ou le binage des betteraves. On intervient pour les garanties complémentaires à 15 % des capitaux engagés», indique Alain Herbet, responsable du marché agricole pour Groupama, dans la Somme.
Pour la grêle, qui a occasionné des dégâts de 25 à 80 % dans les parcelles de blé, la franchise est établie à la parcelle. «Bien souvent, les agriculteurs prennent une franchise moins élevée en grêle, soit entre 5 et 10 % au lieu de 25 %», relève Alain Herbet.
Déclarez vite le sinistre auprès de votre assurance, et si le passage de l’expert n’est pas possible dans les jours qui suivent, prenez des photos.
F. G.