Alimentation
La restauration collective au défi de la viande bio locale dans les assiettes
Ce 5 avril, l’association A Pro Bio organisait au lycée hôtelier Saint-Martin d’Amiens la neuvième édition de Coopérabio, la journée de la restauration collective bio dans les Hauts-de-France. Le thème était celui de la viande bio, qui prend petit à petit sa place dans les assiettes. Le bio en restauration collective reste un challenge au quotidien.
Ce 5 avril, l’association A Pro Bio organisait au lycée hôtelier Saint-Martin d’Amiens la neuvième édition de Coopérabio, la journée de la restauration collective bio dans les Hauts-de-France. Le thème était celui de la viande bio, qui prend petit à petit sa place dans les assiettes. Le bio en restauration collective reste un challenge au quotidien.
La viande bio locale dans les assiettes des cantines scolaires ? Ce n’est plus une utopie en Hauts-de-France, même si les efforts restent à fournir pour le développer. En témoignaient les participants à la journée de la restauration collective bio en région nommée Coopérabio, qu’organise l’association A Pro Bio. Sa neuvième édition avait lieu au lycée hôtelier Saint-Martin, à Amiens.
«Il s’agit d’une journée pour fédérer, mettre en lumière et faire monter en compétences les acteurs de la restauration collective en les sensibilisant au bio. Au vu de la crise sans précédent que la filière connaît depuis dix-huit mois, nous en avons bien besoin», introduit Stéphane Brichet, président d’A Pro Bio. Développer le bio en restauration collective est une des solutions pour sortir la filière de l’ornière. Pourtant, l’objectif de 20 % de produits bio dans les assiettes qu’a fixé la loi Egalim est loin d’être atteint. «On est plutôt autour de 7 ou 8 % en moyenne.» La viande bio, sujet de l’année, en est à ses prémices. Ce 5 avril, elle était au centre du débat et mise en valeur par des chefs de restauration collective qui participaient au concours «Bio des chefs».
Pour Olivier Demarest, éleveur bio de Sainte-Segrée (cinquante mères allaitantes et cent-cinquante brebis), la restauration collective est d’ailleurs un débouché intéressant. «Dès la conversion en 2005, j’ai fait le choix de la vente directe. Il s’agissait des particuliers d’abord, puis rapidement nous avons trouvé un débouché pour des cantines du 5e arrondissement de Paris», témoigne-t-il. Depuis deux ans, il travaille également avec les collèges de l’ouest de la Somme, via la plateforme de vente aux professionnels Approlocal. La vente à la restauration collective présente de nombreux avantages : «Les menus sont rédigés bien à l’avance, ce qui me permet d’avoir une planification à long terme. On travaille sur des animaux “à l’équilibre“, c’est-à-dire que les collèges s’organisent pour se répartir les 300 à 350 kg de viande par bête. C’est aussi moins de temps que la vente aux particuliers, puisqu’il n’y a que deux ou trois points de livraison. Enfin, le prix est défini pour être le plus juste possible pour tout le monde.» La limite est celle des volumes. Impossible pour l’éleveur de livrer dix bêtes d’un coup.
Le porc bio à table
Cette contrainte de volume est levée chez Agriviandes, basé dans l’Avesnois, filiale de la coopérative Cevinor dans les années 1990. Depuis 2010, Agriviandes distribue des viandes bio issues d’éleveurs adhérents de la coopérative. Cette distribution se fait en carcasses, muscles et barquettes destinés aux magasins spécialisés et restaurants collectifs, sous la marque «les prés dans le plat».
L’association viandes bio en Hauts-de-France a aussi été créée en 2013. «Cela nous a permis de développer une filière porcs bio», note Sophie Dupire, responsable commerciale pour la restauration collective chez Agriviandes. «Notre force, c’est d’avoir aussi une activité de chevilleur, pour fournir les boucheries. Entre nos différents clients, nous parvenons à équilibrer les carcasses.» Dans les cantines, le produit phare est le sauté de porc. Mais la saucisserie et les pièces telles que les paupiettes séduisent aussi. En 2019, un pic de développement était atteint avec quarante-quatre porcs bio commercialisés chaque semaine, dans les cantines, les boucheries, et surtout dans les magasins spécialisés bio. «En 2020, malheureusement, le porc bio a subi la crise de plein fouet avec la fermeture de nombreux magasins spécialisés.» Désormais, le chiffre est descendu à vingt porcs bio par semaine. La restauration collective, elle, reste motrice. «La viande de porc bio reste moins cher que la viande de bœuf bio», justifie Sophie Dupire.
Les collèges samariens exemplaires
Du côté de la restauration collective, la dynamique pour atteindre les 20 % de produits bio dans les assiettes est en route, avec plus ou moins d’avance selon les secteurs. Pour les collèges de la Somme, pionniers dans l’approvisionnement local – «voilà douze ans que nous avons lancé la démarche», précise Thomas Huttin, en charge du développement des circuits alimentaires de proximité au Département de la Somme – les produits bio doivent avant tout être locaux. Tout est parti de deux chefs de cuisine de collèges de l’ouest de la Somme, Nicolas Ricouart et Emmanuel Vaillant, qui se sont concertés pour pouvoir s’approvisionner en local. «On a mis en place un tableau de répartition des morceaux de bœuf, pour pouvoir acheter des carcasses entières et travailler “à l’équilibre“.» Aujourd’hui, les deux ex-chefs sont dénommés les Locavores, et sont salariés du Département, avec pour mission d’épauler les chefs de cuisine dans la démarche de l’approvisionnement local. Il font le lien avec le monde agricole : «on cherche des producteurs qui répondent aux besoins des chefs dans leur secteur.» La viande bio dans les assiettes est un nouveau défi.
Des techniques à adopter
Un défi atteignable. En témoigne Sébastien Vasseur, chef de cuisine dans les collèges de la Somme. «Pour pouvoir acheter de bons produits, il y a un travail à faire pour réduire le gaspillage. On a appris à travailler en cuisson basse température, pour perdre le moins de matière possible. Ou encore, on propose aux élèves une petite ou une grosse portion selon leur faim.» Avec l’inflation, les prix en direct du producteur sont même souvent plus avantageux que celui des grossistes. Olivier Demarest l’explique : «je suis autonome en alimentation et en fertilisation. Seules nos charges annexes, comme les frais d’abattage, de découpe, de transport et d’emballage, ont augmenté. Nos produits connaissent une inflation moindre par rapport à l’industriel.»