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Lait : Ludovic Magniez rejoint FaireFrance

Ludovic et Benoît Magniez, installés en Gaec à Beaumont-Hamel, en ont assez de ne pas être rémunérés à hauteur de leur travail d’éleveurs laitiers. Ils ont rejoint le réseau FaireFrance pour changer la donne.

Le lait FaireFrance assure à l’éleveur un revenu de 0,45€/l de lait. En 2018, 10 700 000 l ont été vendus dans huit mille 
magasins (E. Leclerc, Lidl, Auchan, Carrefour, Cora, Intermarché et U). 
Le lait FaireFrance assure à l’éleveur un revenu de 0,45€/l de lait. En 2018, 10 700 000 l ont été vendus dans huit mille
magasins (E. Leclerc, Lidl, Auchan, Carrefour, Cora, Intermarché et U). 
© A. P.



Les Magniez font désormais partie des soixante-dix exploitations laitières des Hauts-de-France qui ont décidé de «prendre leur destin en main» en rejoignant le réseau FaireFrance. «Il y a trente ans, mon père vendait son lait 2 francs le litre. Aujourd’hui, je le vends à 0,32. Soit quasiment la même chose. Mais le consommateur, lui, a vu le prix du lait sacrément augmenter. Où va l’argent ? Cela m’horripile», témoigne Ludovic Magniez.
Avec son frère, Benoît, avec qui il est installé en Gaec à Beaumont-Hamel, ils ont investi dans une part de la société, à hauteur de 1 000 €. «Ce qui nous a convaincu, c’est que cette marque était la première à être créée dans l’idée de rémunérer correctement les éleveurs, et qu’elle leur appartient à 100 %. Le lait équitable leur assure 0,45 €/l.» Leurs 850 000 l de lait produits chaque année continueront cependant d’être livrés à la laiterie voisine, mais ils bénéficieront des bénéfices partagés entre les partenaires de la marque.
Pour faire connaître FaireFrance, Ludovic Magniez s’est engagé à organiser des opérations de sensibilisation des consommateurs. Sa première avait lieu ce 2 février, jour de chandeleur, à l’Intermarché d’Albert. «On n’est pas habitués à parler de notre métier auprès du grand public, mais l’accueil a été très chaleureux. Les gens m’ont confié qu’ils se sentaient perdus entre les trop nombreuses marques. Mais ils comprennent qu’être éleveur nécessite de travailler énormément, et qu’on souhaite être payé à la hauteur du travail fourni
La démarche a séduit le PDG du magasin, Franck Lavalard, qui commercialise cette marque depuis le début d’année : «Proposer du lait équitable à nos clients nous a paru très intéressant. Et l’animation était un plus. Les éleveurs ont des choses à raconter quant à la production de leur produit», confie-t-il.

Concilier le métier et la vie de famille
Ludovic Magniez aime son métier d’éleveur, et y a beaucoup investi. Il chouchoute son troupeau depuis son installation, en janvier 1999, quelques années après son frère aîné. Un nouveau bâtiment d’élevage a été construit l’année suivante, équipé d’une salle de traite de 2x10 vaches. Aujourd’hui, il insémine lui-même, «pour diminuer les charges, mais surtout parce que ça m’intéresse». Il prend soin d’équilibrer la ration, à base de maïs, de pulpes de betterave, de paille de luzerne et d’un correcteur azoté, pour un lait de la meilleure qualité possible…
Deux UTH (unité de travail humain) sont nécessaires pour s’occuper des cent vaches à la traite et de leurs élèves. Hormis cela, les deux frères et leur salariés sont aussi occupés aux 300 ha de céréales, pommes de terre et betteraves. Ils se relaient pour traire et nourrir les bêtes un week-end sur deux.
Tout cela nécessite du temps. Beaucoup de temps. «L’avantage avec les laitières, c’est qu’on n’a pas le temps de dépenser notre argent», ironise Ludovic. Seule une rémunération de 0,45 € permettrait d’augmenter les charges de main-d’œuvre. Car les deux frères ne peuvent pas faire plus que ce qu’ils font déjà. «Produire plus voudrait dire élever plus de vaches, et donc travailler plus. Avoir une vie de famille est important, et notre métier empiète déjà dessus. Ce qu’on a toujours voulu, c’est une juste rémunération.»
Pour Ludovic, rejoindre le réseau est la seule solution qui puisse assurer un meilleur avenir à son exploitation. «Il faut arrêter de croire que les politiques ou les laiteries vont travailler pour nous. C’est à nous de nous bouger.» Rejoindre FaireFrance était sa manière à lui de prendre le taureau par les cornes.

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«Une aventure humaine sensationnelle»

Jean-Luc Pruvot, éleveur laitier installé à Parfondeval, au nord de l’Aisne, a fait partie de FaireFrance dès ses débuts. Il en est aujourd’hui le président.

Quelle est l’histoire de FaireFrance ?
L’idée a commencé à germer en 2009, lors de la grève du lait. A l’époque, les éleveurs jetaient ou  distribuaient le lait gratuitement pour dénoncer des prix trop bas. Les citoyens nous demandaient comment nous aider, en achetant du lait qui nous assurait une rémunération correcte. Mais une telle marque n’existait pas. Les Belges, eux, avaient créé un réseau qui leur appartenait, et qui leur assurait un revenu équitable. Je me suis dit que c’était ce qu’il nous fallait. Il a fallu trouver une laiterie. Celle de Saint-Denis-de-l’Hôtel (LSDH), dans le Loiret, a été la seule à accepter. Il a aussi fallu démarcher la grande distribution, en commençant par les indépendants des zones rurales. On a rencontré des femmes et des hommes qui ont eu envie de nous aider. On s’est occupés nous-mêmes de la création de la marque, du packaging, du transport, etc. Une aventure humaine sensationnelle ! Cinq cents éleveurs sont entrés dans le réseau, et la SAS FaireFrance a vu le jour en septembre 2012. En 2018, nous avons vendu 10 700 000 l de lait dans huit mille magasins (E. Leclerc, Lidl, Auchan, Carrefour, Cora, Intermarché et U).

Quels sont les principes de ce réseau ?
Nous avons calculé que 0,45 €/l était une juste rémunération pour les éleveurs. Nous sommes aujourd’hui environ cinq cent cinquante éleveurs dans toute la France, mais le lait qui est mis dans les briques FaireFrance ne provient que de la soixantaine d’éleveurs proches de la laiterie LSDH. On partage en fait les bénéfices tirés de FaireFrance entre tous les copropriétaires de la SAS, en fonction de leur contribution (de 1 000 à 5 000 €). Pour mon exploitation, par exemple, je peux dire que 30 % de mon volume a été payé à 0,45 €/l grâce à l’argent que j’ai perçu de FaireFrance.

En contrepartie, que doivent faire les éleveurs ?
Ils doivent participer à la promotion de la marque, notamment en menant des actions d’animations dans les supermarchés. Nous rencontrons cinq cent mille consommateurs chaque année ! Au départ, les éleveurs sont obligés de se faire un peu violence pour aller au contact des gens. Mais finalement, c’est une expérience unique : ils sortent de leur ferme et peuvent enfin exprimer ce qu’ils ont sur le cœur. Certains nous ont même confié que cela les avait sauvés…

Quels sont les prochains objectifs ?
Nous voulons rester les pieds sur terre quant à l’augmentation des volumes. Beaucoup essaient de nous faire descendre ce prix en nous proposant de nous acheter plus de volume, mais cela ne nous intéresse pas. 0,45 €/l est non négociable !
Nous avons plutôt comme idée de développer de nouveaux produits pour développer notre gamme (aujourd’hui composée de cinq produits, dont le lait demi-écrémé en brique de 1 l, en bouteille de 1 l et de 50 cl, la crème entière liquide en briquette de 20 cl et le lait demi-écrémé bio en bouteille de 1 l, ndlr). Nous n’avons pas eu de temps pour démarcher de nouveaux éleveurs, mais tous sont les bienvenus.

Propos recueillis par A. P.

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