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Développement territorial
Le CESE réaffirme avec force que «nos campagnes sont vivantes»

Le Conseil économique, social et environnemental a organisé fin septembre un débat sur le thème «Vivre dans les territoires ruraux». L’occasion pour le troisième hémicycle de réfléchir à l’avenir des campagnes, de leur développement économique et de mettre en valeur des initiatives locales.

L’exode urbain lié à l’effet Covid ne semble avoir duré qu’un temps. De nombreuses personnes veulent à tout prix rester dans leurs campagnes.
© PIXABAY

Feue la Délégation à l’aménagement du territoire et à l’action régionale (Datar)* utilisait souvent le terme de «diagonale du vide» pour caractériser les zones rurales à très faible densité démographique. C’est oublier que nos «territoires ruraux regorgent d’activités économiques», se récrie le président du CESE, Thierry Beaudet. Après la mise à jour de la définition par l’Insee (lire encadré), la ruralité représente aujourd’hui 80 % des espaces nationaux, 88 % des communes sur lesquels vivent 30 % de la population.

Inertie des services 
Pour le sénateur Bernard Delcros (UC, Cantal), président du Parlement rural, «on ne répondra pas aux nombreux enjeux et défis futurs sans la ruralité». Et de citer la sécurité et la souveraineté alimentaire, la transition agroécologique, la cohésion nationale et territoriale, la réindustrialisation, etc. La ruralité qui nourrit, parfois à tort mais souvent à raison, le sentiment d’être oubliée des cénacles parisiens bénéficie cependant de politiques publiques permettant d’accompagner les initiatives locales à travers France Ruralités Revitalisation (depuis le 1er juillet 2024) et les programmes Villages d’avenir, Petites villes de demain, ou encore France Services, etc. Elles parviennent tant bien que mal à réduire les handicaps inhérents aux campagnes françaises qui sont dépourvues de services publics de proximité (hôpitaux, écoles…) d’accès à la mobilité et à la culture... «Le problème de ces programmes provient de l’inertie des services qui traitent les dossiers», indique Roger Grueyze directeur général de la société d'économie mixte de la Lozère (SELO). Le temps administratif n’est pas celui de l’économique et du social semble-t-il dire quand il affirme que «les dispositifs devraient aller plus vite». Lui-même tente à travers sa structure de dynamiser ce département dont la population remplirait difficilement le Stade de France. En plus d’avoir développé deux parcs animaliers, deux stations thermales, trois stations de pleine nature, mais aussi réalisé du portage immobilier professionnel et accompagné 33 collectivités locales, la SELO a plusieurs projets dans ses cartons. Parmi eux la création d’une station 4 saisons, une résidence thermale et trois projets de logements : deux lotissements, un collectif de six appartements et un écoquartier. 

Exode urbain 
«Il existe une grande variabilité de l’objet rural» remarque Gilles Laferté, sociologue à l’Inrae de Dijon. La dichotomie entre urbains et ruraux est encore plus nette en fonction des catégories socio-professionnelles. «On constate une popularisation des espaces ruraux quand les classes supérieures s’ancrent dans les villes», constate-t-il. Bien que l’hypothèse soit en cours de vérification, le sociologue subodore que les déménagements s’effectuent de ville à ville et d’espaces ruraux vers d’autres espaces ruraux et donc moins des centres urbains vers les campagnes. Et vice versa. L’exode urbain lié à l’effet Covid ne semble avoir duré qu’un temps**. De nombreuses personnes veulent à tout prix rester dans leurs campagnes. C’est le cas de Davy Delmas, patron de l’entreprise Infaco, basée à Cahuzac-sur-Vère (Lot-et-Garonne). Leader mondial du sécateur électrique, il emploie 120 salariés, réalise 42 millions d’euros de chiffre d’affaires annuel dont la moitié à l’export. Il pointe «le problème de recrutement de talents» en raison du manque de logements sur la commune, mais aussi de mobilité. Plusieurs de ses salariés logent à plusieurs kilomètres. Pour limiter leur empreinte carbone, il a fait installer des bornes de recharge pour ceux qui viennent en véhicule électrique. «Malgré ses contraintes, je m’adapte et je reste, par attachement familial. C’est le sentiment d’ancrage, j’ai l’impression d’avoir des racines sous les pieds», assure Davy Delmas, lui aussi inquiet de «l’inertie de certains services». Il souhaite que ses démarches soient facilitées pour être plus réactif face à la concurrence.

«L’avenir entre nos mains» 
Chacun s’accorde à reconnaître «les aménités positives de la ruralité», en termes de qualité de vie, de tranquillité mais aussi de convivialité et de solidarité. C’est autour du jeu que le Conseil de développement de la communauté de communes de la Dombes (Ain) a fédéré les habitants de cette région aux 1 000 étangs. Le projet de «Le jeu de la Dombes» entend «promouvoir la connaissance du territoire de manière ludique mais aussi renforcer les liens entre les habitants», explique Monique Michel membre de ce conseil de développement. «L’objectif est aussi de mettre en lumière la richesse culturelle, historique et patrimoniale de la région, favorisant ainsi une meilleure connaissance et appropriation du territoire par ses habitants», ajoute-t-elle. Le jeu, réalisé sous forme de Trivial Pursuit local, est actuellement sous presse chez un éditeur breton (Bordier) et sera notamment distribué aux meilleurs élèves de CM2. 
Quelques centaines de kilomètres plus loin à Arvieu (Aveyron), c’est un village 2.0 qui a été mis sur pied grâce à une initiative privée. Un tiers lieu, appelé Jardin d’Arvieu, a été créé. Il réunit des espaces de coworking, une pépinière d’entreprise, une médiathèque, une entreprise coopérative qui crée des sites web, une salle de spectacle, une coopérative de lait de brebis bio, une maison de services, et des espaces dédiés aux séminaires. «Un nouveau projet est en cours avec l’envie de faire du château d'Arvieu, un lieu de résidence et d'exploration, laboratoire de la transition écologique», précise, Perrine Vigroux, chargée de mission développement local au Jardin d’Arvieu. «L’avenir de la ruralité est d’abord entre les mains des acteurs ruraux», résume le président du Parlement rural, Bernard Delcros.  

* Dissoute au sein de l’Agence nationale de cohésion des territoires (ANCT)
** Lire à ce sujet la note n°122 de France Stratégie : «Exode urbain : une mise au vert timide».

La définition de la ruralité selon l’Insee 
Jusqu’en 2020, l’Insee définissait le rural comme l’ensemble des communes n’appartenant pas à une unité urbaine qui est caractérisée par le regroupement de plus de 2 000 habitants dans un espace présentant une certaine continuité du bâti, censée caractériser les «villes». Elle a redéfini le périmètre géosociologique du territoire et mis en place quatre catégories d’espaces ruraux, allant des communes rurales très peu denses, aux communes sous forte influence d’un pôle. «Les territoires ruraux ont ceci en commun qu’en moyenne les disparités de revenus y sont nettement plus faibles que dans l’urbain, du fait d’une moindre présence de ménages sous le seuil de pauvreté dans les communes sous influence d’un pôle, et du fait d’une moindre présence de ménages aisés dans les communes les plus isolées», précise l’Insee. 

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