Le combat contre les antispécistes ne fait que commencer
Au-delà des intrusions dans les élevages
et les sites industriels, les idées véhiculées par les mouvements animalistes radicaux imprègnent la société. S’il est souhaitable de renforcer l’arsenal législatif pour les combattre, c’est la bataille des idées qu’il faut remporter.
«800 actes antispécistes en 2019, un nombre d’intrusion dans les élevages multiplié par trois, 50 boucheries attaquées», a déclaré Damien Abad, député de l’Ain, lors du colloque organisé par Marc Le Fur, député des Côtes d’Armor et Didier Le Gac, député du Finistère, sur le thème «Quelles relations entre l’Homme et les animaux dans la société actuelle», à l’Assemblée nationale, le 13 novembre, à Paris. Autrement dit, tous les observateurs le reconnaissent : la pression des mouvements de défense du droit des animaux est devant nous. Et ce, d’autant plus qu’ils bénéficient de moyens financiers importants, y compris de puissantes associations américaines, comme la Silicone Valley Foundation ou l’Open philanthropie Project.
D’aucuns évoquent une «végan mafia», qui serait le cheval de Troie du capitalisme américain pour imposer la viande artificielle. En fait, trois catégories d’associations peuvent être identifiées, selon Hervé Le Prince, conseiller expert auprès de l’association des Z’homnivores : les welfaristes, plutôt réformateurs, qui plaident pour l’amélioration du bien-être animal et avec lesquels on peut discuter, les abolitionnistes qui militent pour l’abandon de l’élevage et, enfin, les antispécistes hostiles à la hiérarchie de l’homme sur les espèces animales et à la différence entre les êtres vivants. Selon les mouvements animalistes radicaux, «les animaux seraient les nouveaux prolétaires du capitalisme, ils cumuleraient toutes les servitudes et seraient au bout de la chaîne de l’exploitation», selon Francis Wolff. C’est pourquoi, ces mouvements plaident pour la création d’un statut juridique de l’animal, intermédiaire entre les personnes et les biens.
Une idée pernicieuse
Faudrait-il le leur accorder ? Renaud Denoix de Saint Marc, vice-président honoraire du Conseil d’état est catégorique : «attribuer des droits aux animaux, c’est une idée pernicieuse à combattre», a-t-il affirmé. D’abord parce que certains animaux sont des ennemis des activités humaines, comme le doryphore et le frelon asiatique, par exemple, et qu’il est impossible d’accorder un statut égal et unique à tous les animaux quels qu’ils soient : le chien et la puce, le loup et l’agneau… Il n’en reste pas moins que les idées de ces mouvements animalistes infusent dans la société, dans les médias et les réseaux sociaux, où ils sont très présents, dans l’enseignement avec la mise en place de menus végétariens, dans la distribution alimentaire avec le retrait des œufs issus de poules élevées en cage. Sans parler de l’univers social où les éleveurs et les abatteurs sont traités «de meurtriers» ou d’organisateurs de «l’holocauste» des animaux. Des mots particulièrement durs et agressifs qui finissent par culpabiliser les personnes concernées. Quant aux tribunaux, ils ont tendance à privilégier la liberté d’expression au détriment du respect du droit à la propriété, en cas d’intrusion dans les élevages.
Nouveaux textes législatifs
«Je demande aux élus d’agir», a lancé Myriam Gessler, présidente d’un abattoir, d’un atelier de découpe et d’un atelier de salaison, dans l’Ain, et victime d’un incendie criminel, il y a plus d’un an. Même demande d’Anne-Françoise Robin-Picard, éleveuse de poules pondeuses dans le Morbihan, qui a subi deux intrusions successives au printemps dernier. Message entendu par Didier Le Gac qui propose la création d’une Commission d’enquête parlementaire sur la nébuleuse des associations animalistes et sur leur financement en particulier. Il se prononce également sur l’introduction d’une notion de biosécurité dans la loi pour protéger davantage les élevages des intrusions, en mettant l’accent sur les risques de diffusion d’épizooties. Il se montre également favorable à la création d’un observatoire associant les services de l’État (les préfets) et les professionnels, agriculteurs et industriels, dans chaque département, pour prévenir et réagir de la façon la plus adéquate aux actes de malveillance. Quant à Marc Lefur, également favorable à la création de la Commission d’enquête, il plaide pour le renforcement des sanctions et la suppression du privilège fiscal dont bénéficient les dons à ces associations. Reste que, et la plupart des intervenants en convenait, c’est la bataille des idées et celle de l’opinion qu’il faut gagner. Et cela, c’est une autre affaire, face à un mouvement qui prend de plus en plus d’ampleur.
Six antispécistes arrêtés plus d’un an après l’incendie d’un abattoir dans l’Ain
Six personnes défendant la cause animale ont été interpellées le 19 novembre dans le cadre de l’enquête sur l’incendie criminel d’un abattoir dans l’Ain, en septembre 2018. Ces trois hommes et trois femmes, originaires de Lyon et de sa banlieue et âgés d’une trentaine d’années, «contestent toute participation aux faits», a indiqué à l’AFP le procureur de la République de Bourg-en-Bresse, Christophe Rode, confirmant une information du quotidien Aujourd’hui en France. «Ce sont des personnes insérées, sans antécédents judiciaires, défendant avec conviction la cause animale, antispéciste», a ajouté le magistrat. Quatre des six suspects ont été présentés vendredi à un juge d’instruction berjallien puis mis en examen pour «incendie volontaire et association de malfaiteurs». Deux ont été placés en détention provisoire et un troisième devait l’être le 22 novembre en soirée. Le quatrième a été placé sous contrôle judiciaire. Les deux derniers individus ont été remis en liberté à l’issue de leur garde à vue, selon la même source. Dans la nuit du 27 au 28 septembre 2018, un violent incendie avait ravagé, sans faire de blessés, la moitié des 4 000 mètres carrés des abattoirs Gesler.