Le Cube ou comment placer l’éleveur au cœur du digital
Le Cube, nouvelle entreprise qui se veut innovante en élevage, a été portée sur les fonts baptismaux, le 24 janvier, à Amiens.
chef de projet Le Cube.
Le Cube ? Non, il ne s’agit pas de la célèbre boîte de nuit belge, où les fêtards de tous poils se donnent rendez-vous, ou celle d’Amiens, moins connue, mais tout aussi courue. Le mot est tendance, un brin branché, et est censé rappeler la relation triangulaire que cherche à créer l’entreprise entre l’éleveur, le conseiller et la plate-forme téléphonique que le premier pourra joindre pour toute question, et ce, même si un cube a six faces. Et qu’importe si le mot n’évoque pas tout de suite de quoi il s’agit, selon les cinq membres de cette nouvelle aventure, dont quatre sont issus des rangs de Novial, spécialiste de l’aliment animal, et filiale de Noriap.
Tout a démarré par un constat. Avec l’émergence du Big data, de nombreuses données sont produites dans les exploitations, mais peu ou mal exploitées (résultats cellulaires d’une vache tout au long de l’année, taux butyriques, lactation, déplacements des animaux, etc.). Autre constat : nombreux sont les agriculteurs à être noyés dans cette masse de données. Or, cette dernière est une mine d’or par le potentiel de prédiction qu’elle détient.
Mais pour pouvoir exploiter ces données, il faut y avoir accès, soit obtenir le feu vert des éleveurs, comme des organismes agricoles et professionnels qui gravitent autour de ceux-là (contrôle laitier, CPIE, Idele, bases vétérinaires, outils digitaux et connectés dans les exploitations, etc.), et qui en ont aussi, en partie, la propriété. La démarche est en cours auprès de chacun d’eux.
«Rendre humain le digital par le conseil»
Quoi qu’il en soit, forts de leur intuition - tels des «anges gardiens», ainsi qu’ils se nomment eux-mêmes - les membres de l’équipe Le Cube ont décidé de monter une entreprise, qui propose aux éleveurs un service de conseil fondé sur une «méthode inédite d’analyse des données de chaque exploitation», dixit la chargée de communication et de marketing pour Le Cube et Novial, Fanny Leclercq. «L’idée est d’accompagner les éleveurs pour qu’ils ne soient pas seuls au moment de prendre des décisions, mais sans faire à leur place», ajoute Michel Muselet, chef de projet Le Cube.
La méthode inédite réside en fait dans l’informatisation des données encore sur papier, couplées à celles qui le sont déjà, puis à leur croisement. Ces données concernent à la fois les performances sanitaires, les relevés de production, les résultats économiques, etc. Autant de données qui seront mises à jour dès qu’une nouvelle information pointe le bout de son nez.
Les données non numérisées telles que les besoins, les objectifs et les marges de progrès dans son élevage seront aussi collectées. Puis, selon la demande de l’éleveur, l’entreprise développera des indicateurs personnalisés afin de faire corréler les résultats aux objectifs. Parmi les indicateurs personnalisés retenus, pour l’instant, se trouvent la marge par vache, la qualité du lait par rapport au prix payé, la quantité d’aliments distribués par rapport à la quantité théorique d’aliments à donner, l’efficacité alimentaire, et le rapport entre les taux butyriques et les taux protéiques.
«En cas d’écart constaté sur ces indicateurs, l’éleveur est alerté et peut consulter en temps réel l’équipe de la plate-forme téléphonique que nous avons mise en place ou son conseiller habituel, afin d’élaborer ensemble une solution ciblée au problème identifié», explique Michel Muselet. L’idée, vous l’aurez compris, est d’apporter un conseil haut de gamme associant l’exploitation des données numérisées et un contact permanent entre l’entreprise et les éleveurs. Le tout résumé par la formule suivante du chef de projet Le Cube : «rendre humain le digital par le conseil».
Création de la société et du service conseil
Portée sur les fonts baptismaux le 24 janvier, à Amiens, l’entreprise Le Cube, une SAS d’un capital de base de 250 000 €, rassemble, pour l’heure, Noriap, Novial, Ysea et Terre animale. A l’heure où nous bouclons, la répartition de l’actionnariat n’était pas encore tranchée. Quoi qu’il en soit, l’idée n’est pas de faire de l’entre-soi. «L’entreprise a le souhait d’ouvrir le capital à tous les partenaires qui seraient intéressés tels que des centres de gestion, des banques, des laiteries, des coopératives, des cabinets de vétérinaires, etc.», complète Fanny Leclercq. Le ticket d’entrée ? Pas encore tout à fait défini.
Côté mise en route du service, d’ici quinze jours, la version starter du logiciel sera livrée par la start-up en charge de le mettre en musique. Cette version sera ensuite testée jusqu’au début juin dans des exploitations d’élevage sur tout le territoire. Sa commercialisation sera lancée officiellement le 10 juin, à Tilloy-lès-Mofflaines, lors de «Terres en fête», soit le Salon de l’agriculture de la région des Hauts-de-France. Une offre de lancement sera alors faite.
Trois niveaux de l’offre de conseil devraient être mis en place. Pour chaque niveau, un audit complet de l’exploitation sera proposé, ainsi que la restitution des résultats. Des visites seront programmées dans l’exploitation, leur nombre variant suivant le niveau de l’offre choisi. Les éleveurs auront accès, bien sûr, au logiciel, quel que soit leur niveau d’offre retenu, ainsi qu’à la plate-forme téléphonique mise en place. En revanche, le suivi des alertes sera fonction, lui, de l’offre retenue, ainsi que l’accès à d’autres logiciels intégrés dans le logiciel de l’entreprise tels que les analyses de lait, les données technico-économiques, les données du contrôle laitier, pour ne citer que quelques exemples. Coût moyen par mois, tous niveaux confondus : autour de 99 €.
Le service de conseil sera proposé tout d’abord aux éleveurs laitiers. L’étape suivante : les éleveurs de vaches allaitantes. D’ici une année, Le Cube ouvrira son service à toutes les productions animales (petits ruminants, volailles, porcs, chevaux et lapins). L’entreprise a pour objectif de toucher, dans un premier temps, cinq cents éleveurs. Mais, à terme, le but est d’atteindre les cinq mille.
Si la finalité de ce nouveau service est bel et bien de chercher des progrès, de la valeur ajoutée en élevage via la mise en place de technologie numérique, de numérisation et de conseils, «on ne parle pas que d’économie et de performances. Si des éleveurs ont des projets de développement de leur exploitation ou bien veulent aller plus loin dans le bien-être animal, on pourra aussi les accompagner dans leurs objectifs», précise Michel Muselet. Autrement dit, suivant les besoins des éleveurs, la nouvelle entreprise fonctionnera en mode start-up, comprenez, elle sera capable de s’adapter en développant de nouveaux indicateurs personnalisés. Ce que l’on appelle, en couture, du sur-mesure.