Le sacre du steak haché sonnera-t-il le glas de l’élevage allaitant ?
La consommation de steak haché ne cesse d’augmenter au détriment des autres morceaux de viande. Vu la transformation du produit, l’origine allaitante est plus difficile à valoriser face à une origine laitière.
Le mois de janvier 2015 affiche une hausse de 8% de la consommation de steak haché, selon le Kantar Worldpanel. En France, le steak haché a la cote au détriment des morceaux piécés de viande (entrecôtes, faux-filet, filet mignon, etc). Les longues préparations culinaires comme le pot-au-feu ou le bourguignon ne sont plus au goût du jour vu l’évolution du mode de vie. La consommation est à la rapidité et au snacking. «En 2014, les achats de morceaux de viande de bœuf traditionnels “à bouillir et à braiser” sont en baisse de 6%», écrit Jean-Paul Bigard, président du premier groupe transformateur de viande en France, Bigard, et également président du syndicat des entreprises françaises des viandes.
Le pouvoir d’achat, en berne, pour bon nombre de consommateurs du fait de la crise n’améliore pas les choses et les Français, globalement, consomment moins de viande. Au final, le steak haché tire la consommation de viande bovine. Il en représente 40% (1).
Laitier ou allaitant, le haché reste du haché
Et pour un steak haché, vache allaitante ou vache laitière, le résultat sera le même. Par contre, la vache laitière aura produit un élément de plus par rapport à la vache allaitante : du lait. La vache laitière gagne en rentabilité dans un contexte de compétitivité accentué. Lait, veau, viande pour steak haché, la vache laitière a tous les atouts. Et si l’on rajoute le fait que la durée de maturation de viande et non la race de l’animal est à l’origine principalement de son goût et de sa tendreté, la vache allaitante semble vraiment mal partie.
Quelle sera alors sa place dans les années à venir ? «C’est une vraie question», aussi bien pour Pierre Richard, directeur commercial chez Deltagro-Union, que pour Jean-Marc Chaumet, chef de projet conjoncture viande bovine à l’Institut de l’élevage.
Une vache à viande comme animal de compagnie
L’engraissement au tourteau de soja et à l’ensilage de maïs n’aura plus de sens, sachant qu’il en perd déjà. «Il faudra vendre sous marque», estime Pierre Richard, même si des marques «il y en a déjà pas mal !». Ensuite, «alléger les poids carcasses» pour mieux répondre au marché et «améliorer les facilités de vêlage» pour éviter, entre autres, les surcoûts des césariennes.
Il cite la Limousine ou la Blonde d’aquitaine, bonne élève, face à la Charolaise avec des poids carcasses de plus de 500 kg parfois. Il voit la population d’éleveur vieillissante et les difficultés d’installation. Reste l’idée de l’export. Pas mieux. Pierre Richard s’inquiète de l’arrivée des pays de l’Est. «En dix ans, la Pologne a rattrapé la France» sur certain type d’animaux, s’exclame-t-il effaré, avec des coûts de production plus bas.
Voit-il un retour des races mixtes lait-viande, de la bonne Normande par exemple ? «En France, on a trop spécialisé. On est le seul pays à l’avoir fait. Ce n’est adapté ni au marché mondial, ni au marché européen». Il imagine des croisements holstein et blanc bleu belge, «qui donne de très bons résultats». Plus globalement, «je n’ai jamais vu de tels bouleversements dans cette filière et aussi rapidement», assure-t-il.
Conserverons nous la diversité de nos races de vache allaitante en 2050 ou bien leur avenir sera-t-il similaire à celui des chevaux de trait ? Une charolaise comme animal de compagnie, comme tondeuse dans son jardin ou comme animal de foire dans un parc d’attraction, pourquoi pas ?
(1) selon Pierre Richard, directeur commercial chez Deltagro-Union, qui voit arriver d’ici peu un chiffre de 50%.