Marché d’intérêt local en Picardie Maritime : le concept se précise
Le 14 mars, le cabinet Gressard présentait son étude sur
la création d’un marché d’intérêt local en Picardie Maritime, devant une quarantaine de producteurs et d’acheteurs.
D’un côté, il y a des chiffres encourageants : 1 260 exploitations agricoles en Picardie Maritime, au moins 6 coopératives, des OP, 21 ateliers de transformation, 38 restaurations collectives, 5 lycées, 11 collèges, 2 hôpitaux, 20 maisons de retraite, 426 restaurations privées, 80 bouchers, 100 000 habitants sur le terrain, 7,8 millions de nuitées par an générés par le tourisme. De l’autre, un projet de création d’un marché d’intérêt local en Picardie Maritime, soit un marché permanent dans un lieu physique, porté par le syndicat Baie de Somme 3 Vallées, mais qui ne soulève pas l’enthousiasme des producteurs et des potentiels acheteurs, toutes catégories confondues, en dépit des atouts du territoire.
Ce projet connaîtra-t-il le même sort que celui du micro-abattoir imaginé par des éleveurs, à Flixecourt ? A savoir un projet revu de fond en comble. C’est ce qui semble se dessiner au vu de l’enquête menée par le cabinet Gressard sur la création d’un tel marché en Picardie Maritime. «L’idée d’une plate-forme physique de rencontres et de commerce entre producteurs, particuliers, collectivités, restaurateurs, commerçants et grossistes est, aujourd’hui, remise en cause», indique Solène Denisot, chargée d’étude au cabinet Gressard. Et pour cause.
Côté producteurs, l’intérêt est des plus mesurés, faute de temps à y consacrer. Par ailleurs, nombre d’entre eux vendent déjà sur des marchés de plein vent ou directement sur leur ferme, sans compter ceux qui sont en contrat. Ce qui soulève une autre interrogation : y aura-t-il suffisamment de produits pour achalander ledit marché ? La question se doit d’être posée. Côtés acheteurs, toutes catégories confondues, le manque de temps est mis en avant pour se rendre sur un marché. Hormis certains commerces et quelques restaurateurs, qui seraient prêts à se rendre sur place, tous les autres demandent à être livrés chez eux. Grossistes et transformateurs n’y voient, eux, aucun intérêt, les premiers considérant un tel marché comme concurrent pour leurs affaires, les seconds ayant déjà leurs circuits et leur logistique. Le projet serait-il mort-né ? Pas si sûr.
De nouvelles pistes
Si les producteurs y voient un intérêt minime, ils se disent intéressés par un dépôt-distribution, soit un local où ils pourraient livrer leurs marchandises. Leur commercialisation serait ensuite assurée par un prestataire. L’idée fait consensus, toutes catégories confondues, «mais à condition que ce dépôt-livraison propose une souplesse dans son organisation, les volumes à y apporter, une politique de prix permettant d’être compétitif, et un professionnalisme garantissant la gestion et la répartition des commandes», précise Laurent Chevalier, chargé d’étude au cabinet Gressard.
Autre hypothèse : la constitution d’un annuaire à partir de la plate-forme de Somme produits locaux, développée par la Chambre d’agriculture de la Somme. Si l’outil est considéré pertinent par les producteurs et les acheteurs, tous émettent le souhait d’une amélioration de l’expérience utilisateur pour les acheteurs, ainsi que d’un meilleur référencement des produits. La plate-forme devrait aussi, selon eux, prévoir plus d’animations, plus de services, dont un service logistique. Après quelques réticences émises par la chambre d’agriculture sur le projet de ce marché d’intérêt local, «il y a, aujourd’hui, la volonté de travailler ensemble et en bonne intelligence», souligne Solène Denisot.
Dernière hypothèse : le marché d’intérêt local, initialement pensé comme permanent, pourrait être un marché ouvert une fois par semaine ou tous les quinze jours, permettant ainsi de conserver l’idée d’une rencontre physique entre acheteurs et producteurs. On passera donc d’un format régulier à un format événementiel. Si l’idée ne déplaît pas, la piste qui semble la plus attractive est, cependant, celle d’un dépôt-livraison. «C’est celle qui répond vraiment à une demande de territoire», constate la chargée d’étude.
Reste à l’organiser, ou plutôt à trouver le prestataire volontaire et capable d’assurer la logistique, voire de faire de son local le dépôt. «Il faut travailler sur l’existant, dit-elle. Des prestataires sont déjà sur place, mais ils ne sont pas forcément connus de tout le monde, tels que la société SF Trans, spécialisée dans la logistique du froid, basée notamment à Amiens. A l’étroit dans leurs locaux à Amiens, ils seraient prêts à s’installer à Abbeville, à condition de trouver le site adéquat pour assurer la logistique, et à condition que le projet se développe», précise-t-elle. Une piste qui mérite, dans tous les cas, d’être explorée, selon le cabinet. Si le projet d’un marché d’intérêt local n’est donc pas pour aujourd’hui, dans un lieu permanent, cela ne signifie pas son abandon. Suivant le développement du projet, il pourrait être d’actualité plus tard.