Massive, spontanée et longue : la mobilisation a été forte
Jeunes Agriculteurs et Fdsea ont organisé plusieurs blocages dans la Somme, les 21 et 22 juillet.
Ils ont été plus de 500 agriculteurs à répondre à l’appel de leur syndicat pour mettre, à Amiens et Abbeville, la pression sur le gouvernement, les 21 et 22 juillet.
©
AAP
Entre un ministre aux abonnés absents, un président de la République qui se réveille, le coup de force des agriculteurs normands et la stratégie de fond du réseau Fnsea, la question que s’est posée le bureau de la Fdsea, convoqué le matin même du 20 juillet par Françoise Crété était simple. Il ne s’agissait pas de savoir si le département entrait en action, mais plus simplement quand et comment. Et la réponse fut tout aussi simple. Quand ? Le plus vite possible. Comment ? En emboîtant sur le terrain le pas pour mettre la pression sur les pouvoirs publics, puis en allant voir, comme prévu, les transformateurs sur la deuxième partie de la semaine.
Les sms partaient lundi soir, les tracteurs arrivaient mardi matin et leur nombre toujours croissant ne cessait de refléter la colère des agriculteurs. 100, 200… et très vite plus de
500 d’entre eux, de tous âges et de toutes filières, bloquaient les accès routiers principaux aux villes d’Amiens et d’Abbeville. Une affluence qui aurait pu être surprenante, si l’on ne connaissait pas l’ampleur de la crise actuelle de l’agriculture et des craintes pour les prochains mois, notamment en élevage.
D’ailleurs, c’est précisément sur le secteur d’Abbeville que l’affluence a été la plus dense avec près de 250 manifestants. Toute entrée et toute sortie d’Abbeville par le nord étaient bloquées (par l’est, l’échangeur autoroutier était en travaux). Quant à Amiens, c’était dans un premier temps les entrées nord (RN 25), sud (route de Paris) et est (Longueau), qui étaient bloquées, avant d’avoir une généralisation sur d’autres axes, hormis ceux desservant les centres de soins.
Pourquoi les villes ? Parce qu’à l’heure où le sommet de l’Etat commence à prendre conscience de la crise, il appartient bien aux pouvoirs publics de prendre les dispositions nécessaires et de les faire exécuter pour sauver tout un pan de l’économie nationale. C’est d’ailleurs le message passé par Françoise Crété et une délégation de manifestants à Nicole Klein, préfète de région Picardie et de la Somme (voir encadré).
Trois axes de revendications
Trois axes de revendications
Les revendications reposaient sur trois axes : une implication totale pour permettre aux prix des produits agricoles de rémunérer justement et dignement le travail des agriculteurs ; un soutien d’urgence pour les exploitations en grande difficulté et vulnérables ; une écoute spécifique de la part des administrations. Une fois ce message passé à la préfète de région, représentante de l’Etat, il fallait attendre de savoir si le message était reçu au niveau national.
C’est ainsi qu’on a vécu une opération escargot géante en fin d’après-midi autour d’ Amiens, puis la reprise des blocages sur l’A16 à Abbeville, la zone de Longueau et l’accès de la rocade «aux bornes du temps», qui ont tenu toute la nuit et la matinée avec, comme objectif, les annonces du gouvernent suite au conseil des ministres de mercredi matin.
Suite aux annonces du ministère et aux premiers propos de Xavier Beulin, président de la Fnsea, les blocages ont été levés et chacun s’est replongé dans les travaux des exploitations. Néanmoins, l’utilité d’une prochaine mobilisation restant toujours d’actualité, chacun reste pleinement mobilisé, prêt à agir de nouveau, si les résultats escomptés ne sont pas au rendez-vous ou si l’attitude des transformateurs ou des centrales d’achats restent toujours aussi rigide au détriment du secteur de la production.
Sept revendications formulées à la préfète
Avec Françoise Crété et Armand Paruch, président de la Fdsea et des Jeunes Agriculteurs sont venus porter sept revendications à Nicole Klein, préfète de région Picardie. Parmi eux, Olivier Thibaut, président des producteurs de lait, Xavier Théron, président de la section porcine, Marc Hossart et Bernard Delefortrie, membres du bureau de la Fdsea. Aux côtés de la préfète étaient présents Nadine Chevassus, directrice adjointe de la Draaf, et Damien Lamotte, directeur adjoint de la Ddtm.
Les revendications étaient les suivantes :
Mesures d’urgence
Mesures d’urgence
- Une implication totale du ministre de l’Agriculture
Dans un pareil temps de crise, le ministre de l’Agriculture doit être exclusivement focalisé sur les problématiques agricoles.
- Des mesures de sauvegarde sur les exploitations d’élevage
En extrapolant les chiffres du ministre, plus de 300 exploitations du département sont menacées d’ici à la fin de l’année. Des mesures de protection de leur trésorerie doivent être décrétées au plus vite.
- Des mesures de compensation des pertes liées à l’embargo russe.
Si l’on peut comprendre les décisions géopolitiques, le secteur de l’agriculture et de l’agroalimentaire ne doit pas être sacrifié ; c’est à l’Union européenne et à la France de mettre en place la compensation nécessaire pour les filières concernées, notamment celle d’élevage et de la pomme de terre.
Une action forte et immédiate sur les prix
Une action forte et immédiate sur les prix
- Une application de la loi Hamon
Alors que celle-ci prévoit la possibilité de renégocier les prix des volumes engagés avec la grande distribution lorsque les charges de production ne sont plus couvertes, celle-ci préfère se réapprovisionner au moins cher en Europe. C’est une attitude irresponsable en matière d’emploi et de valeur ajoutée nationale.
- Un patriotisme alimentaire
L’Etat peut et doit intervenir sur la mise en place et la promotion des filières 100 % nationales, et sur le contrôle de leur authenticité dans les rayons.
La préférence nationale doit aussi faire partie des appels d’offres dans la restauration hors foyer sous contrôle des administrations et collectivités territoriales (y compris écoles, lycées, collèges, centres de soins ou d’accueil).
Une écoute
Une écoute
- Une pause sur les charges et les contraintes Srce, directives nitrates et loi sur la biodiversité doivent faire l’objet d’un moratoire pour en évaluer finement la pertinence et l’incidence économique.
- Compétence et compréhension dans l’interprétation des textes et dans la conduite des contrôles sur les exploitations
La préfète s’est, d’un côté, engagé à remonter chacune des doléances et, de l’autre, à mandater ses services pour que tous les cas individuels de difficultés des agriculteurs soient traités avec une attention particulière avec les services.