Mobilisation pour le maintien des quotas betteraviers
De nombreuses voix se sont jointes à celles des planteurs pour demander la prolongation du régime sucre jusqu’en 2020.
«La France est favorable au prolongement de l’organisation commune du marché du sucre jusqu’en 2020». A l’Assemblée générale de la Confédération générale des planteurs de betteraves (CGB), le 11 décembre à Paris, le ministre de l’Agriculture a été très clair. Il soutient sans ambiguïté la position professionnelle en la matière. La CGB fait de la reconduction du règlement sucre jusqu’2020 la priorité de ses priorités dans le cadre de la réforme de la Pac. «Nous avons besoin d’une période de stabilité d’ici 2020 pour parfaire notre compétitivité. Ne pas prendre cela en compte, c’est risquer de remettre en cause toute une filière de production déjà mise à mal par les incessantes concessions en matière de contingents tarifaires à l’occasion de négociations d’accords bilatéraux de libre-échange», a insisté le président de la CGB, Eric Lainé. La CGB estime qu’il faut encore quelques années aux planteurs pour rattraper le retard de compétitivité par rapport à notre principal concurrent, le Brésil. En France cette position est partagée par la Fnsea. «Il serait hasardeux, avant 2020, de supprimer l’encadrement de la production betteravière pour gagner des marges de compétitivité et pour que la betterave puisse faire des sauts technologiques et de productivité» a assuré Xavier Beulin. Les Allemands sont sur la même longueur d’ondes. «Il serait irresponsable de supprimer les quotas» a renchéri Joachim Rukwied, le président de la DBV, invité à l’assemblée générale.
La Commission minoritaire
En tout cas la cause des quotas progresse en Europe. Une majorité des membres de la Commission de l’Agriculture du Parlement européen soutient le rapport Dantin qui propose la prolongation du règlement sucre jusqu’en 2020. Lors du Conseil des ministres de l’Agriculture des 28 et 29 décembre, une majorité d’Etats membres, 14 pays sur 27, se sont prononcés en faveur de la reconduction du règlement sucre jusqu’en 2020. Non seulement une majorité de pays ne suivent pas les propositions de la Commission européenne, mais ces pays qui émettent un avis divergent totalisent deux tiers des voix.
Il n’en reste pas moins que l’Exécutif de Bruxelles campe sur ses positions. Yves Madre, le conseiller technique de Dacian Ciolos reste arc bouté sur son schéma libéral. «Nous sommes convaincus que l’échéance de 2020 est un tantinet éloigné et qu’elle n’est pas nécessaire à la compétitivité» de la filière betteravière, a-t-il déclaré. Et d’expliquer que l’Union européenne a déjà ouvert son marché du sucre sans droit et sans limite de quantité, en vertu de l’accord «Tout sauf les armes» en 2005. Que les exportations communautaires sont limitées à 1,370 million de tonnes. «Ou bien, on attend que les importations arrivent et les quotas seront la variable d’ajustement, ou bien on change de schéma et on se met en état de satisfaire le marché communautaire et les opportunités du marché mondial». Il faut reconnaître que son argumentation n’a pas fait bouger les lignes, loin de là, chacun campant sur ses positions.
ZOOM
L’éthanol dans la transition énergétique ?
La CGB veut faire de l’éthanol un marqueur de la transition énergétique que la France souhaite engager par ailleurs. Alors qu’un coup d’arrêt a été donné à son développement. Convaincue de la responsabilité des biocarburants dans le changement de l’affectation des sols, de la concurrence avec la production alimentaire ainsi que de la flambée des prix des matières premières agricoles, la Commission de Bruxelles propose en effet de ramener à 5 % le taux d’incorporation des carburants de première génération. Le relais devant être pris par les carburants de deuxième génération, voire de troisième pour atteindre le seuil d’incorporation de 10 % des énergies renouvelables dans les carburants.
Une argumentation qui n’est pas franchement partagée par la CGB. «Il est temps d’arrêter de se bercer d’illusions sur une 2ème génération, voire une 3ème génération disponible en 2020» tonne Eric Lainé. «Il est temps de ne pas écarter de la ré-industrialisation de la France une filière qui a su déjà investir un milliard d’euros et qui demain peut être un facteur de développement majeur de notre agro-industrie» poursuit-il. En faisant remarquer au passage qu’un tiers seulement des stations service SP95/E10 distribuent des biocarburants, alors que ce carburant est de 5 à 6 centimes moins cher, et que les pétroliers avaient pris l’engagement de distribuer le SP95/E10 dans 70 % des pompes dès 2010. Réponse de Stéphane Le Foll, «La France n’est pas favorable à réduire l’incorporation à 5 %». Elle défendra à Bruxelles le taux d’incorporation de 7 % qui constitue un équilibre entre «la question alimentaire, la préservation des investissements industriels et la sauvegarde de l’emploi», a-t-il précisé