Plus de variétés bio pour répondre au marché
Les Chambres d’agriculture du Nord-Pas-de-Calais, de la Somme et la Fredon ont dévoilé il y a quelques jours leurs coups de cœur variétaux en pommes de terre bio pour les emblavements 2020.
La question agite depuis quelques temps les producteurs de pommes de terre en bio : y aura-t-il suffisamment de plants disponibles pour la campagne 2020-2021 ? Alors que le nouveau règlement européen de l’agriculture biologique – il entrera en application au 1er janvier 2021 - impose l’utilisation de plants bio pour produire des pommes de terre de consommation AB, la Fédération nationale des producteurs de plants de pommes de terre (FN3PT) s’est montrée rassurante lors de son congrès les 4 et 5 décembre derniers à Poitiers : «La filière du plant certifié anticipe depuis deux ans les nouvelles réglementations et sera prête dès 2020, pour répondre à la demande», a ainsi rappelé son directeur, Bernard Quéré. Lors d’une présentation des résultats d’essais de la vitrine variétale de pommes de terre bios dans la Somme le
17 décembre, à Estrées-Mons, Alain Lecat s’est montré plus réservé. «Face à l’augmentation de la demande, il n’est pas sûr qu’il y ait des plants pour tout le monde. Même si on annonce un équilibre entre la production de plants bios et la demande, il faut être prudent. On est à flux tendus», expliquait à un groupe d’une dizaine de producteurs de la Somme le conseiller bio de la chambre d’agriculture.
Des surfaces en progression
En 2019-2020, la production française de pommes de terre bios a occupé 1 738 hectares, répartis entre le marché du frais (1 152 hectares) et celui de l’industrie (328 hectares). «C’est 10 % de plus qu’en 2018, constate Alain Lecat, avec une progression plus marquée des surfaces dédiées à l’industrie.» La récolte annuelle se chiffre ainsi à 41 900 tonnes à laquelle s’ajoute un volume de pommes de terre importées de 1 200 tonnes. Fonction de la disponibilité de l’origine France, on constate que le volume importé fait office de variable d’ajustement pour répondre à la demande du marché national. Le rendement français affiche en 2019-2020 une légère progression, passant de 22,9 t/hectare à 26,3 t/hectare, avec de fortes disparités puisque les rendements s’échelonnent entre 20 et 43 t/hectare. Les principales régions de production de pommes de terre bios sont la Bretagne et les Hauts-de-France avec respectivement 33 % et 31 % des surfaces cultivées, tandis que d’autres régions accroissent régulièrement leur production. C’est le cas par exemple des régions Centre et Grand-Est, passant chacune de 12% à 16% des récoltes et de 6 % à 12 %.
En termes de prix, une certaine «stabilité d’une année sur l’autre» est constatée dans les rayons des grandes et moyennes surfaces. D’août à novembre, le prix d’un kilo de pommes de terre bios cultivées en France s’est affiché à 2,17 E pendant la campagne 2019-2020, contre 2,05 E/kilo pendant la campagne précédente et 2,08 E/kilo pendant la campagne 2017-2018.
Comment choisir ses variétés ?
Pour Alain Lecat, l’un des premiers critères de choix d’une variété reste bien «la résistance au mildiou». Plusieurs essais conduits par les Chambres d’agriculture du Nord-Pas-de-Calais, de la Somme et la Fredon tentent d’identifier les variétés qui se comportent le mieux face à différentes situations et attentes : rendement, calibre, résistance aux maladies et au stress hydrique, dormance, type culinaire, taux de matière sèche, notation visuelle... Pour les emblavements 2020, des variétés de plus en plus nombreuses sont proposées par différents obtenteurs. Dans la catégorie des «chair ferme», si Ditta et Allians restent des valeurs sûres, Tentation fait partie des autres choix possibles tandis que les variétés Almunda, Princess, Siéna et Glorieta figurent parmi celles «à essayer». Dans le segment des variétés dites «de consommation», les producteurs prudents s’orienteront vers Otolia, Azilis, Siena, Blanche ou Michel ; Connect fait partie de ces variétés «possible», tandis que Acoustic, Levante et Caméo sont «à essayer». Pour le débouché industriel, Carolus et Jelly restent des variétés incontournables. Agria s’affiche comme un choix «possible», tandis que Kelly et Louisa sont à «essayer». S’il existe bien un panel variétal de plus en plus large, force est néanmoins de constater que le choix d’une variété ne dépend pas seulement de la volonté de celui qui la produit : «Quand on travaille avec certains opérateurs, on n’a pas forcément le choix, admet Alain Lecat. Il ne faut pas se lancer dans la production d’une variété si l’on ne sait pas ce que l’on va en faire. À moins de faire de la vente directe, la contractualisation est obligatoire.»
Quant au recours à l’irrigation, les avis sont partagés : si certains producteurs estiment devoir s’en passer «par éthique» et ne constatent pas de différence sur la qualité et le rendement grâce à l’irrigation, d’autres considèrent que l’irrigation est nécessaire pour répondre aux critères qualitatifs du marché du frais. Un vaste débat qui n’a pas fini de faire couler de l’encre et de l’eau...