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Pomme de terre : un début de récolte inquiétant dans la Somme

Les conditions climatiques de cet été ont des conséquences en culture de pommes de terre.

Champ de variété Markies encore vert. Quelques rejumelages au pied.
Champ de variété Markies encore vert. Quelques rejumelages au pied.
© Solene Garson

Si la canicule, qui a frappé la France et une partie de l’Europe en juillet et début août, est derrière nous et que, depuis, la pluie est tombée et les températures ont baissé, «on reste encore dans un état de sécheresse prononcé et, pour certaines parcelles, c’est trop tard», précise François-Xavier Broutin de l’Union nationale des producteurs de pommes de terre (UNPT). Sans oublier les forts orages de mai et de juillet, qui ont provoqué des phénomènes de ravinement endommageant les structures de sol. Reste que, dans la Somme, «les parcelles se sont bien refaites dans l’ensemble», observe Solène Garson, conseillère technique au Gitep.
Quoi qu’il en soit, même si les surfaces d’emblavement en pommes de terre de conservation ont augmenté partout en France de 3 % en moyenne, voire de 4 % dans l’ex-Picardie, les premiers prélèvements effectués font état d’un rendement en baisse de l’ordre de 7 %, soit autour de 32 t/ha environ, et ce, toutes régions et tous débouchés confondus, à date identique, par rapport à la moyenne quinquennale nationale. La baisse est même estimée autour de 10 % pour l’ex-Picardie (prélèvements réalisés en semaines 31 et 32, soit avant les pluies, ndlr). Ces conditions météorologiques exceptionnelles auront aussi un impact important sur les calibres des pommes de terre et la qualité.

Début des arrachages dans la Somme
Sur le terrain, dans la Somme, alors que les arrachages ont commencé pour les pommes de terre à chair ferme, ainsi que pour les pommes de terre d’industrie précoces et polyvalentes, on observe des fonds durs et des buttes très sèches dans les parcelles, «mais ce n’est pas partout. La situation est vraiment hétérogène d’un secteur à l’autre», indique Solène Garson. Et d’ajouter : «Si ce n’est pas la première fois que nous avons des conditions sèches à l’arrachage, en revanche, c’est bien la première fois que toute la campagne s’est déroulée dans ces conditions. Autre nouveauté observée : ce climat caniculaire a entraîné une incubation plus prononcée des pommes de terre, conduisant à des phénomènes de rejumelage régulièrement observés et des parcelles défanées depuis plus d’un mois redémarrent également depuis une quinzaine de jours
Bien qu’il soit prématuré de tirer des conclusions, les rendements des premières pommes de terre à chair ferme arrachées laissent présager «des rendements moyens, voire mauvais. La variété Amandine, par exemple, n’a pas bien tubérisé. Son rendement pourrait être autour de 35 t/ha. Marylin semble s’en sortir avec une meilleure tubérisation, mais les rendements resteront moyens», pense Solène Garson. En pommes de terre de consommation ou équivalentes, les situations présentent de fortes hétérogénéités en la matière, avec des rendements estimés entre 40 et 60 ha/t. Pour la pomme de terre d’industrie, «les rendements devraient être compliqués, soit autour d’une trentaine de tonnes par hectare, mais on ne peut pas généraliser», insiste-t-elle. Note d’espoir : les variétés tardives auraient la possibilité de se développer, et donc de faire du rendement.
Enfin, pour la pomme de terre féculière, la situation ne se présente pas au mieux, en raison notamment de problèmes de rejumelage. Des difficultés sont à attendre tant en volume qu’en qualité. Le développement de ce secteur, qui était prévu par la hausse des surfaces, ne pourra pas être aussi rapide que prévu, en raison du contexte de production de cette année. Toutefois, «la tardivité des variétés féculières permettra, peut-être, si les conditions météorologiques deviennent rapidement favorables, de limiter les conséquences négatives de la sécheresse. Reste que la quasi-totalité des parcelles de fécules ne sont pas irriguées», note l’UNPT. Pour l’heure, l’usine de Vecquemont, au vu de ces conditions, a retardé sa mise en route du 3 au 10 septembre.
Au vu de ces conditions, Solène Garson conseille de défaner rapidement pour préserver la qualité dans les parcelles qui présentent de la sénescence. Par ailleurs, avec des conditions actuelles, qui sont favorables au développement du mildiou, les agriculteurs doivent être attentifs à bien protéger leurs parcelles jusqu’à la fin du cycle. «Il faut également raccourcir le délai entre le défanage et la récolte pour réduire les pressions rhizoctone brun et dartrose», insiste-t-elle. Et de conclure : «Il sera difficile dans certaines parcelles d’arracher sans faire de chocs, si celles-ci ne sont pas arrosées

Les inquiétudes des producteurs

Dans de telles circonstances, les producteurs craignent de ne pas pouvoir honorer les volumes contractés avec leur acheteur, négociant ou industriel. «Il y aura des acheteurs plus conciliants que d’autres. Mais beaucoup de producteurs redoutent de devoir acheter des pommes de terre à l’extérieur pour pouvoir honorer leur contrat. Ce qui représentera alors un véritable surcoût et mettra en difficulté certaines exploitations. Et ce, malgré la reprise du marché et des prix qui repartent à la hausse sur le marché du libre. De toute façon, les pommes de terre sur le marché du libre ne suffiront pas à compenser les pertes si les prévisions de récolte se confirment», relève François-Xavier Broutin. Sans compter l’explosion des surcoûts entre la non-livraison accompagnée du rachat de pommes de terre, le passage au bain de sel pour éliminer les tubercules vitreux, le déclassement à cause de la matière sèche trop élevée, etc.
Au vu de la situation et du risque  d’incapacité des producteurs à fournir l’ensemble des volumes contractés, les syndicats agricoles vont entrer en discussion avec les acheteurs pour leur demander de faire preuve de souplesse avec les agriculteurs. Certains gouvernements ont été sollicités, en parallèle, pour que soit reconnue une situation de catastrophe naturelle, ce qui permettrait aux producteurs d’invoquer le cas de force majeure auprès de leurs clients et de ne pas être obligés, le cas échéant, de livrer l’ensemble des volumes contractualisés. Quoi qu’il advienne, la plus grosse facture risque d’être pour les producteurs…

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