Poul’haies arbres : de l’agroforesterie pour les volailles
L’agroforesterie fait partie des pistes qu’émet le Haut conseil du climat pour atteindre l’objectif zéro carbone en 2050. Cette pratique se développe dans les élevages de volailles de la Somme, grâce notamment à l’association Poul’haies arbres de Novial.
Chaque jour, les 4 460 poules pondeuses bio de Marie-Paule Bertrandie gambadent tranquillement entre la cinquantaine d’arbres du parcours d’1,80 ha. Pommiers, poiriers, cerisiers, mirabelliers et noyers ont été plantés en 2001 dans cet élevage de Dury. «Nous sommes installés dans une commune péri-urbaine, et un volet paysager est à respecter, précise l’agricultrice. Nous avons choisi des arbres fruitiers pour pouvoir profiter de leur production.» Mais plus qu’un simple décor, ces arbres présentent de réels atouts.
Des atouts que la toute récente association Poul’haies arbres, créée en 2019 par Novial (filiale de Noriap spécialisée en nutrition animale) et un groupe d’agriculteurs, a à cœur de transmettre. «Nous voulons favoriser le partage des bonnes pratiques entre agriculteurs», précise Mathilde Dubocage, de Novial.
40 agriculteurs sont désormais adhérents, dont l’éleveuse duryenne, et 26 000 plantations ont été effectuées sur 200 ha en un an. Objectif : 300 000 arbres sur environ 1 000 ha.
Bien-être animal… Et humain !
Premier avantage de l’agroforesterie en élevage avicole : le bien-être animal. «Lorsqu’il fait chaud, toutes les poules sont sous les arbres, certifie Marie-Paule Bertrandie. Le bâtiment reste plus frais l’été, et il est moins froid l’hiver grâce à l’effet brise-vent.» Les fruits font le bonheur des petits gosiers. Les Bovans mangent toutes les cerises qui tombent au sol. «Elles sautent même pour attraper celles des branches basses !» Les arbres sont aussi source de bien-être pour l’éleveur. «Je suis heureuse de travailler dans un joli cadre. Nous donnons une bonne image aux voisins, et les bonnes relations sont appréciables.»
Poul’haies arbres met d’autres avantages en avant : par la réduction de l’amplitude thermique (protection du soleil et du vent), elle prévient le risque de piquage, ou de cannibalisme et développe le comportement exploratoire des animaux. L’agroforesterie participe également à l’enrichissement de l’écosystème et de la biodiversité de l’exploitation : fertilisation de la terre, contribution à la santé du sol, lutte contre l’érosion. Enfin, elle contribue à la diminution d’émissions de gaz à effet de serre par la captation du carbone par les arbres. «Le rôle de l’association est également de créer des indicateurs scientifiques pour mesurer les impacts positifs des plantations», précise Mathilde Dubocage. Sur le plan économique, elle permet à l’éleveur d’accéder à de nouveaux débouchés : bois d’énergie, bois d’œuvre, bois raméal fragmenté…
À chaque élevage son parcours
Mais Mathilde Dubocage prévient : «mettre un parcours d’arbres pour les volailles nécessite du savoir-faire, et une certaine expertise technique. Chaque aménagement représente un parcours personnalisé à mettre en place, qui doit s’adapter aux caractéristiques de chaque exploitation (type de sols, vents dominants, orientation du bâtiment...) et aux objectifs de l’agriculteur.» Des formations sont donc proposées régulièrement pour permettre à chacun de définir son projet. Parmi les solutions proposées : des haies en peigne à la sortie des trappes pour inciter les poules à explorer toute la surfaces, des bosquets pour protéger la périphérie, ou encore des arbres isolés pour l’ombrage. Marie-Paule Bertrandie, elle, a veillé à un écartement suffisant des arbres, «car je voulais pouvoir passer un tracteur pour faucher l’herbe.»
La combinaison de l’expertise des conseillers agroforestiers et des techniciens avicoles Novial permet aux éleveurs d’être accompagnés dans le choix des espèces d’arbres en fonction de l’ensoleillement, du sol, de l’objectif de la valorisation, mais aussi de les aider à respecter, entre autres, les normes de biosécurité et d’utilisation du bâtiment.Comptez entre 2 500 et 3 000 €/ha de parcours. Des aides peuvent être levées : «Un appel à projet de la Région et le PCAE permettent de couvrir 80 % des frais.»