Un livre de recettes des bouchers qui sublime les produits locaux
98 bouchers, originaires de 98 départements, ont mis en commun leur recette préférée dans un livre autour des produits carnés pour les fêtes de fin d’année. Dans la Somme, il s’agit de Sébastien Pocholle, à Amiens.
98 bouchers, originaires de 98 départements, ont mis en commun leur recette préférée dans un livre autour des produits carnés pour les fêtes de fin d’année. Dans la Somme, il s’agit de Sébastien Pocholle, à Amiens.
Un gigot d’agneau AOP des prés salés de la Baie de Somme confit, cuit longuement et à basse température pour une viande moelleuse à souhait, accompagné de pommes de terre, «de préférence, des petites rattes du Touquet» et de tomates. Voilà la recette que propose Sébastien Pocholle, boucher-charcutier-traiteur installé avenue Paul Claudel, à Amiens, dans le livre de recettes «98».
Ce livre émane de la volonté de la CFBCT (Confédération française de la boucherie, boucherie-charcuterie, traiteurs) de mettre à l’honneur ses étals. 224 pages dédiées à la gourmandise, avec des recettes entièrement à base de viande, et des conseils livrés par 98 artisans issus de 98 départements. «Être choisi pour paraître dans ce livre est la reconnaissance du travail que nous nous efforçons de faire au mieux chaque jour», commentent Sonia et Sébastien Pocholle. Le couple a choisi de mettre en avant l’agneau de prés salés «car il est un des emblèmes de la Somme». Ce livre est un petit coup de projecteur en plus, pour cette maison déjà reconnue dans le secteur de l’amiénois, au sein de laquelle travaillent quatorze personnes. En témoigne la file d’attente qui ne désemplissait pas, ce 22 décembre, à l’approche des fêtes de fin d’année.
De père en fils
Sébastien Pocholle est comme qui dirait tombé dans le chaudron du métier quand il était petit. «Mon père a ouvert sa boucherie à Albert en 1988, raconte-t-il. Nous vivions dans un logement au-dessus et je donnais un coup de main en rentrant de l’école.» Son père reprend ensuite la boucherie des Halles, à Amiens, et Sébastien entame sa formation professionnelle en apprentissage à seize ans. Il y a trois ans, il saisit l’opportunité de s’installer à son compte dans le nouveau concept Place ô Marché. Ce qui le passionne ? «Quand un client reviens nous voir en nous disant qu’il s’est régalé, on a tout gagné», sourit-il. Sébastien Pocholle a même tissé une relation privilégiée avec quelques clients historiques. «Certains me connaissent depuis que j’ai douze ans.»
Les clients, eux, sont séduits par le credo de la maison : la Viande avec une majuscule. La qualité est le maître-mot. Son label «Artisan en’Or», qu’il expose fièrement sur les produits de sa vitrine, le prouve d’ailleurs. Ici, la viande est soigneusement choisie. «Je travaille le plus possible avec des éleveurs locaux, qui ont le souci du travail bien fait et du bien-être animal.» Le porc fermier est labellisé Bleu blanc cœur, les volailles sont sous Label rouge. Pour le bœuf, le boucher travaille uniquement les races à viande : Limousine, Angus… Le local est privilégié le plus possible. «J’aime aller à la ferme pour voir comment les animaux sont élevés. Le contact avec l’éleveur est très important», assure-t-il. Le professionnel est exigeant : «Les bêtes que j’achète ont entre quarante et quarante-cinq mois, ont eu au moins un veau, ont été nourris principalement à l’herbe et font 450 à 500 kg minimum à l’abattage.»
«La viande, ça se respecte»
Pour la première année, Nicolas Sangnier et Francis Pruvot, éleveurs de Blondes d’Aquitaine à Hornoy-le-Bourg, vendent ainsi une à deux bêtes par mois au boucher amiénois. Il s’agit de vaches labellisées Bleu blanc cœur, et Label rouge depuis cette année. «Le troupeau va à l’herbe le plus possible, et l’hiver, elles sont nourries au foin et foin de luzerne principalement, explique Nicolas Sangnier. Pas de soja, pas de maïs, mais du lin extrudé à hauteur d’1 kg par jour pendant quatre-vingt-dix jours.» La commercialisation auprès de Sébastien Pocholle apporte une plus-value financière, mais l’éleveur retient surtout la valorisation du produit final. «Il n’y a pas de gâchis, parce qu’il sait mettre en valeur tous les morceaux.»
«La viande, ça se respecte, martèle le Boucher. Ici, on pratique la coupe Française, réalisée avec des gestes précis.» Lui travaille des carcasses entières, qu’il parvient à valoriser entièrement grâce à la transformation. «Nous avons par exemple la chance de pouvoir proposer des agneaux des prés salés pour les fêtes, grâce aux conditions météos clémentes qui ont permis aux éleveurs de sortir leur troupeau plus longtemps.» L’agneau de
21 kg, qui provient de l’élevage de Jérémy Mallot, à Cayeux-sur-Mer, permettra d’élaborer plusieurs recettes. Le gigot et les côtes étaient déjà vendues avant la découpe. Le collier, beaucoup moins demandé, finira en terrine d’agneau aux salicornes, en coucous ou en tajine.
Cet approvisionnement au niveau régional a permis à la boucherie de pouvoir satisfaire la clientèle pendant le premier confinement, si particulier. «C’était incroyable, se souvient Sonia Pocholle. Les gens faisaient leurs provisions de peur de manquer. Certains ont redécouvert les magasins de proximité comme le notre. Nous avons fait des semaines de 110 heures pour pouvoir contenter tout le monde.» Aujourd’hui, le rythme s’est rapproché de la normale, mais les tendances de consommation évoluent bel et bien : proximité, traçabilité et bien-être sont requis. Un animal bien élevé, puis une viande respectée et sublimée est la clé de la réussite selon Sébastien Pocholle.