Campagne betteravière 2016 et conseils pour 2017
Le 4 janvier, le comité technique de l’ITB organisait une réunion à Amiens pour les planteurs.
Au programme : agronomie, récolte, désherbage, etc.
La culture betteravière n’a pas été à l’abri des aléas climatiques de cette année, même si, au final, la qualité et le rendement ont été supérieurs à ce qui était prévu, soit à 86 tonnes à 16. Les semis 2016 ont été finalement assez précoces. 80 % d’entre eux ont été réalisés entre le 15 et le 24 mars. Sur limon, les semis se sont faits avec des préparations de sol assez secs en surface, mais de qualité. En revanche, le ressuyage ayant été plus lent sur les sols argileux, le dessèchement a été rapide et le réappuyage inexistant, ce qui a eu un impact sur la mise en terre de la semence. «Pour éviter cette situation, la solution est de préparer les sols à l’arrière-saison d’avant, avec un labour en octobre de l’année précédente. En procédant de la sorte, on obtient ainsi une bonne qualité de la structure superficielle au printemps et un semis dans la date moyenne», indique Thierry Leclère, responsable de l’ITB de la Somme.
Mais s’il y a eu un problème au cours de la campagne, c’est la présence d’aphanomyces, cochlioides, un champignon connu, mais qui apparaît d’ordinaire au printemps, provoquant des fontes de semis. Sauf que, cette année, celui-ci a fait son apparition durant l’été, engendrant la déformation des racines de betteraves, et ce, dans de nombreux champs. «Il n’y a aucun moyen de lutte contre ce champignon quand il survient en végétation. Les traitements de Tachigaren, même renforcés, ne peuvent rien faire. Aussi conseillons- nous de maintenir un bon état agronomique des parcelles pour éviter que les eaux ne stagnent au printemps», précise l’expert de l’ITB.
Autre problème et nouveauté de la campagne 2016 : la montée en puissance des ombellifères. Elles sont passées de 5 % en 2015 à 16 % en 2016. Parmi les autres mauvaises herbes de 2016, ont été signalés des matricaires, des chénopodes et des chardons laiterons. Là encore, les conséquences n’ont pas manqué, puisque celles-ci entraînent des pertes de productivité dues au salissement des parcelles. L’ITB incite donc les planteurs à une meilleure observation de leurs champs et à une connaissance des adventices pour agir à temps et ne pas compromettre leur compétitivité. Enfin, autre situation inédite pour le département avec la cercosporiose, qui est devenue la maladie foliaire dominante à partir du 15 août.
Conseils pour 2017
En raison du gel survenu dernièrement, le travail du sol 2017 sera facilité. Aussi, celui-ci pourra être superficiel sans trop de passages, en recherchant le nivellement et le rappuyage optimum afin de rendre plus aisé le travail du semoir. Par ailleurs, si les labours reverdissent en graminées ou dicotylédones, il sera impératif de nettoyer les parcelles avec des produits à base de glyphosate. De même, les reliquats azotés devraient être plus élevés en 2017, les doses à apporter seront donc plus faibles.
En ce qui concerne les parasites, l’ITB met en alerte sur la présence de plus en plus nombreuse de limaces. Et de rappeler que les betteraves sont sensibles jusqu’au stade 6 feuilles. Quant au stade d’intervention, il doit s’effectuer pour une limace noire par mètre carré et quatre limaces grises par mètre carré. Autre parasite émergeant dans la Somme : la teigne. Peu de dégâts ont été cependant constatés. Il n’empêche. «S’il y a du stress hydrique pendant l’été, on peut y être confrontés», dit Thierry Leclère. La vigilance s’impose donc là aussi.
Même combat pour les mauvaises herbes, particulièrement les ombellifères qui ont proliféré en 2016. Pour les éthuses, la pré-émergence à base de Zepplin n’est pas obligatoire, «car il y a des possibilités d’intervention efficaces en post-émergence, relève Thierry Leclere. Les produits incontournables à ajouter au mélange de base Betanal Tramat ou Betanal Booster sont le Zepplin à 0,6 l et le Safari à hauteur de 15 à 20 gr par hectare. Si à l’éthuse s’ajoutent des chénopodes, le Zepplin n’est pas efficace sur ces derniers. Du coup, il faut renforcer le Betanal de 1 l à 1,2 l par hectare et y associer du Goltix ou Menhir FL avec Safari à hauteur de 15 à 20 gr par hectare.»
Plus difficile est la lutte contre l’ammi majus, une adventice très difficile à détruire. A défaut de solutions vraiment efficaces, la pré-émergence avec du Zepplin à 3 l reste conseillée et à appliquer dans les 48 heures suivant le semis. Toutefois, si le temps est sec après le semis, cette pré-émergence manquera d’efficacité. Dans tous les cas, il faut savoir que le produit est peu efficace sur les racines. Par ailleurs, son coût est élevé, soit 77 €/ha. Dans le cas d’un traitement en post-émergence, outre la base Betanal et Tramat ou Betanal Booster, il faudra ajouter du Zepplin à 0,6 l et Safari à 20 gr par hectare dans le mélange. «Si à l’ammi majus s’ajoutent des chénopodes, il faudra renforcer le Betanal de 1 à 1,2 l. Par contre, il faudra alterner les séquences, d’abord Zepplin et Safari, puis Goltix ou Menhir FL avec Safari».
Last but not least, pour les variétés en 2017, l’ITB conseille aux planteurs de les choisir en fonction du risque maladie régional annuel le plus fréquent (rouille, ramularia, oïdium, cercosporiose). A éviter donc, les variétés trop sensibles qui pénaliseront le potentiel, notamment en arrachage tardif.
«Attention, prévient Thierry Leclère, aux parcelles 2014 mal protégées et qui voient le retour des betteraves en 2017, car les maladies se conservent dans les sols. Par ailleurs, les rotations courtes sont plus favorables aux maladies.»
Choix des variétés
Les planteurs doivent choisir leurs variétés en fonction du parasitisme dominant et des problèmes agronomiques rencontrés sur leurs parcelles. Le choix le plus judicieux est de retenir les variétés en fonction de celles dont les effets sont confirmés depuis deux à trois ans. Les parasites les plus importants dans la Somme sont les nématodes. Les variétés les plus résistantes à ceux-ci sont, par exemple, Millenia KWS et Acacia (variétés confirmées depuis trois ans), ou encore Gallop et BTS 890 (variétés confirmées sur deux ans). «Dans tous les cas, il faut s’orienter vers des variétés stables en termes de productivité et de richesse. Autrement dit à productivité égale entre plusieurs variétés, il vaut mieux choisir celle qui a la meilleure richesse», conseille Thierry Leclère.
Les orientations de l’ITB pour 2017
La filière betterave a connu de nombreux tangages en 2016 avec la perspective de la fin des quotas en 2017 et la remise à plat de l’accord interprofessionnel. La fin des quotas allait-elle annoncer la fin de la filière ? «Non, répond le président de l’ITB, Alexandre Quillet. Au final, les planteurs, les groupes sucriers et le syndicat - même si ce dernier n’a plus le même rôle - parlent tous désormais d’une même voix. Nous pouvons donc désormais envisager l’avenir technique de la filière avec sérénité.»
L’objectif de l’ITB reste le même : améliorer la compétitivité de la filière, ce qui passe par une meilleure productivité, une baisse des coûts de production et des intrants. Pour ce faire, l’institut travaille en étroite collaboration avec les sélectionneurs, les entreprises de produits phytosanitaires, les instituts de recherche publique et privée, comme les constructeurs de machine.
En termes de recherche, il est notamment partie prenante dans les programmes Aker et Syppre. Le premier, dont le but est de doubler la vitesse du progrès génétique en betteraves, en utilisant des ressources génomiques suit son cours, dans le calendrier prévu. En 2018-2019, 3 000 génotypes devraient être phénotypés. Quant au programme Syppre, qui vise à construire un système de culture de demain assurant une meilleure productivité, une rentabilité économique et l’excellence environnementale, sont en cours de test sur des plates-formes expérimentales. Des réseaux d’agriculteurs innovants participent aussi à Syppre.
Intégré, par ailleurs, au réseau Acta l’ITB y apporte son expertise en termes de recherche et d’innovation. «L’Acta a décidé de se diriger vers l’Europe. Autrement dit, il y aura des financements Feader et du second pilier à aller chercher», précise Alexandre Quillet.
Autre cheval de bataille de l’ITB : les néonicotinoïdes. «Nous travaillons sur le sujet en tant que référent scientifique, précise Vincent Laudinat, directeur de l’ITB. Comme vous le savez les néonicotinoïdes seront interdits à partir du 1er septembre 2018. Nous considérons que c’est un choix aberrant, car ce produit est efficace, et il n’y pas de solution alternative à ce jour. Aussi, intervenons-nous auprès du ministère pour obtenir des dérogations allant au moins jusqu’aux semis 2020.»