Génisses : la carrière des primipares est-elle liée au premier comptage cellulaire ?
L’entrée de primipares dans le troupeau est souvent considérée comme le moyen le plus efficace pour maîtriser le taux cellulaire de l’élevage laitier. Or, le résultat n’est pas toujours à la hauteur des espérances.
Jusqu’à récemment, les efforts pour améliorer la qualité cellulaire du lait consistaient essentiellement à revoir les techniques de traite afin de réduire le taux d’infection en lactation (mousses désinfectantes en prétraite, désinfection des faisceaux trayeurs…). Bien que nécessaire dans certaines situations, ce travail n’a pas totalement résolu le problème. L’IGL (cf. encadré) a diminué, sans forcément entraîner la baisse du taux cellulaire.
Pour expliquer cette situation, l’hypothèse, souvent avancée, est basée sur l’observation du statut cellulaire des primipares. Elles ne sont pas suffisamment saines alors qu’elles doivent prendre la place des vaches chroniquement infectées.
Pathogènes majeurs et mineurs
L’étude des plus de 32 000 primipares introduites en 2016 dans les troupeaux suivis par Avenir conseil élevage vise à comprendre ce que deviennent les primipares après six comptages cellulaires individuels (CCI), soit entre 180 et 240 jours. Trois seuils ont été retenus pour caractériser ces CCI.
Le premier correspond au seuil supérieur à à 300 000 cellules. Les vaches de cette classe sont infectées par un pathogène majeur, c’est-à-dire un germe qui a un impact économique (Staphylocoque Aureus, Streptocoque Uberis, E.Coli). Le second seuil est compris, lui, entre 200 et 300 000 cellules. Dans cette classe, des pathogènes mineurs sont présents, ainsi que quelques pathogènes majeurs. Quant au dernier seuil, il est inférieur à 100 000 cellules. A ce stade, il est considéré qu’aucun germe n’est présent dans la mamelle.
La bibliographie présente parfois l’intérêt des pathogènes mineurs. Ils permettraient de mettre en alerte la vache. Pourtant, la réalité du terrain semble plutôt indiquer qu’il s’agit d’une première étape vers des infections plus graves.
Ce premier comparatif met en évidence la corrélation entre le pourcentage de primipares, qui démarrent à moins de 100 000, et l’IGL moyen du troupeau auquel elles appartiennent.
Les conditions d’élevage peuvent expliquer ce premier constat : le manque de main-d’œuvre et de place en bâtiment est autant préjudiciable pour les infections en lactation que sur celles des primipares.
Pour aller plus loin, il faut comparer le statut cellulaire des primipares au 6e CCI selon leur 1er CCI. Autrement dit, les primipares saines le restent-elles ? Et celles infectées sont-elles guéries ?
Lorsque les primipares démarrent leur lactation avec une mamelle «ensemencée», y compris par des pathogènes mineurs, elles vont très vite virer à plus de 300 000 cellules. Il devient alors très difficile de soigner au tarissement ces infections enkystées depuis au minimum quatre mois.
Une primipare à plus de 300 000 au premier CCI a peu de chances de faire une deuxième lactation. Le problème, c’est qu’elle n’est pas encore «amortie». Ce sont donc celles qui restent qui devront faire un peu plus de carrière pour payer la primipare partie trop tôt.
Cela interroge sur l’intérêt d’élever beaucoup de femelles quand la place ou la main-d’œuvre manquent pour faire une bonne conduite. Ne vaudrait-il pas mieux quelquefois élever moins, mais dans de bonnes conditions afin d’avoir des animaux qui vieillissent bien dans les troupeaux ?
Une étude réalisée par Louis Painchart, en stage à Avenir conseil élevage, démontre l’impact du premier comptage cellulaire individuel des primipares sur leur carrière.
Indice global de lactation (IGL)
Cet indicateur permet de définir la proportion de vaches nouvellement infectées d’un comptage à l’autre. Pour maintenir une situation saine, il doit être inférieur à 6 %. Il reste correct entre 6 et 10 % (moins de 8 % pour les troupeaux de plus de 80 vaches) et il est à améliorer lorsqu’il est supérieur à 10 %.