Les agriculteurs créateurs de véritables œuvres dans les champs
L'agriculteur, par son métier exerce un effet sur le paysage. Mais parfois, il peut aller encore plus loin en faisant naître dans les champs des effets visuels encore inconnus.
Qu'elles soient l'œuvre d'un groupe d'agriculteurs dans le cadre d'un projet collectif, d'un artiste qui travaille avec la collaboration d'un agriculteur, toutes les œuvres ont au moins deux points communs : elles sont éphémères, et elles ne peuvent vraiment être appréhendées que lorsqu'il y a de la distance entre la personne qui les regarde et les créations elles-mêmes. Ainsi, les cercles de culture, expression traduite de l'anglais "crop circle", correspondent à la réalisation d'un motif géométrique dans un champ de céréales. Il s'avère que ce motif est dû à la torsion des épis. Ces cercles de culture sont aussi appelés "cercles de récolte" ou "agroglyphe (de agro, et de glyphe, pour la représentation graphique).
"Cercles de culture"
Les agroglyphes sont apparus à la fin des années 1960. Le premier à évoquer ces créations fut le propriétaire d'une plantation en Australie. En 1966, celui-ci prétend qu'il a vu le décollage d'un aéronef qui avait atterri dans un marécage.
Sur place, on découvre que les végétaux ont été aplatis de façon circulaire. On parle alors de "nids de soucoupe". D'autres "nids de soucoupe" apparaîtront ensuite en Angleterre, au Canada. Certains y verront la signature d'extra-terrestres.
Si l'on cherche une explication rationnelle, ces cercles de culture, loin d'être l'œuvre de petits hommes verts, sont plutôt le fruit du travail d'hommes de la terre. En Angleterre, deux fermiers finiront par avouer qu'ils ont eux-mêmes créés de nombreux "cercles de culture", juste pour faire une plaisanterie.
Quand artistes et agriculteurs travaillent ensemble
D'autres œuvres, différentes des cercles de culture peuvent aussi être vues dans les champs. Elles sont nées de l'imagination d'artistes. C'est le cas des créations de Jean-Paul Ganem. Ce dernier alors qu'il a 25 ans et qu'il est peintre, se voit offrir la possibilité de vivre dans une résidence d'artiste à Méry-sur-Oise (Oise). Jean-Paul découvre alors la campagne. Il s'aperçoit en peignant des paysages que ceux-ci changent de couleurs avant qu'il ait fini de les peindre.
Lui vient alors l'idée de travailler lui-même dans les champs. Dessins sous le bras, il prend rendez-vous avec un agriculteur pour lui demander sa collaboration. De cette rencontre Jean-Paul Ganem tirera l'idée que la collaboration artistique avec un agriculteur n'est pas aussi simple que cela et qu'elle dépend de nombreux facteurs.
Sa première création : la reproduction d'un code barre avec des bandes de trèfle rouge et des bandes de colza sera victime d'une attaque de limaces. L'occasion pour l'artiste de se rendre compte qu'il y a des prédateurs dans la campagne et que «dans la nature, il y a toujours des surprises». Depuis, Jean-Paul Ganem a réalisé plus de 50 projets dans les champs.
Des créations dans les champs pour la publicité
D'autres créations peuvent aussi apparaître dans les champs avec un message. Ainsi, le patron d'une société bourguignonne : Distrimix, qui vend des distributeurs de papier toilette a décidé en 1992 de faire apparaître le nom de sa société sur une pente en bordure de l'autoroute A6, sur la colline de Gros Mont, entre Joigny et Auxerre.
Sur un terrain de cinq hectares, chaque année, et cela pendant au moins dix ans, il a fait passer un message pour vanter son produit. Les lettres du message de 30 mètres de hauteur ont, en fait, été créées en fonction des années grâce à un ensemencement de blé, de colza ou de phacélie. Le quotidien anglais : «le Sun», commandera la création d'un agroglyphe au moment des Jeux olympiques de Londres. Il sera réalisé en plein jour, sur le sol français, en sept heures de temps.
Des créations pour le concours «Les agriculteurs aiment le Tour»
Depuis sept ans le public du Tour de France s’est aussi habitué à voir d’autres créations dans les champs tout au long des étapes. Il s’agit des réalisations que les équipes des Fdsea (fédérations départementales des syndicats d’exploitants agricoles) créent chaque année, sur un thème donné, à l’occasion du Tour de France.
Ainsi depuis 2008, dans le cadre du concours : «les agriculteurs aiment le Tour», les agriculteurs ont fait apparaître successivement dans les champs, des cœurs, des maillots, des cartes de France, des vélos, des gâteaux d’anniversaire. Le thème imposé par la Fnsea n’empêche pas les équipes des Fdsea de laisser libre cours à leur imagination et à leur créativité tout en mettant en avant les pratiques ou les produits locaux.
Et c’est ainsi qu’au fil des ans, les spectateurs et les téléspectateurs du Tour ont pu découvrir de véritables chefs d’œuvres réalisés par les agriculteurs avec leurs productions végétales, leurs produits locaux et le matériel qu’ils utilisent au quotidien : céréales pour certains, salades, aulx, carottes et radis pour d’autres, ou encore fruits d’été, lavande, graines et fleurs de tournesol, balles de foin, de paille et bâches. Cet été, les agriculteurs sont encore au rendez-vous du Tour : en effet quinze Fdsea se sont portées candidates. Elles ont créé seize «Terres vues du ciel» pour le plus grand plaisir de millions de spectateurs et de téléspectateurs.