Les semis à 45 cm remis en cause
Passer d’un écartement de 45 à 30 centimètres apporte son lot d’avantages selon l’Institut technique de la betterave,
qui admet toutefois qu’un écartement de 50 centimètres offre le meilleur compromis.

Pour l’Institut technique de la betterave (ITB), le choix de l’écartement entre rangs lors des semis reste bel et bien une question d’équilibre entre optimum agronomique et facilité lors de la récolte. Après avoir testé trois écartements
- 30, 50 et 60 centimètres -, l’ITB a livré les résultats de ses travaux. Tandis qu’en Nord-Pas-de-Calais, l’écartement standard est de 45 centimètres, on constate qu’il est plutôt de 50 centimètres dans les départements de l’Est de la France (Alsace) ou au sud de Paris.
Des essais remis au goût du jour
Selon les travaux de l’ITB, un semis à 30 centimètres offrirait le meilleur optimum agronomique, ainsi qu’une couverture du sol plus rapide. D’après un essai réalisé en 2017, à Vimy, le semis à 30 centimètres affiche une couverture de sol de 56 % au 16 juin, contre 52,5 % pour un semis à 50 centimètres et de «seulement» 39,1 % pour un semis à 60 centimètres.
Un semis à 50 centimètres permettrait, quant à lui, une harmonisation des écartements entre cultures sarclées et améliore le rendement des chantiers de semis et de récolte. Enfin, plutôt utilisé aux Etats-Unis, le semis avec un écartement de 60 centimètres limite les coûts de production. Seulement, rapporte l’ITB, «plus l’écart est important entre rangs, et plus le salissement est important» ; d’où des efforts supplémentaires à mener en matière de désherbage, soit par davantage d’interventions chimiques - faut-il encore que cela soit autorisé -, soit par binage.
En termes de productivité, un semis à 30 centimètres permettrait de gagner 2,1 % de rendement comparé à un semis à 45 centimètres. Un écartement de 50 centimètres fait baisser le rendement de 1,76 % par rapport à un semis à 45 centimètres, tandis qu’un semis à 60 centimètres le fait chuter de 3,44 %. Pour l’ITB, qui a réalisé ces essais dans plusieurs départements (Aisne, Champagne et Pas-de-Calais), «il y a quand même encore besoin d’en mener d’autres pour confirmer, ou non», témoigne Vincent Delannoy, délégué de l’ITB Nord-Pas-de-Calais. Et d’ajouter que la variation de l’écartement de semis pour améliorer la productivité de la betterave n’a rien de «révolutionnaire». La moyenne de cinquante-cinq essais réalisés entre 1995 et 2017 montre en effet une différence d’environ 1 % entre un semis à 45 centimètres et un semis à 50 centimètres.
Le match 30 contre 50
Pour résumer les avantages du semis à 30 centimètres, l’ITB mise sur l’optimisation du rendement obtenu, une meilleure couverture du sol permettant d’utiliser moins d’herbicides ou de réduire le travail de désherbage, et un taux d’accidents de levée atténué. Parmi les inconvénients, on retient toutefois qu’il n’existe pas encore à ce jour de matériel de récolte adapté. L’arrachage doit, de fait, s’effectuer exclusivement par l’avant, avec un taux de tare terre plus élevé. Nécessaire au désherbage, le binage est plus compliqué, donc plus cher. Un semis à 30 centimètres n’aurait «pas d’incidence sur le développement de maladies par contact, ni sur l’allongement des campagnes», selon Vincent Delannoy.
Le semis à 50 centimètres permet, quant à lui, un gain de temps de l’ordre de 10 %, d’où des frais réduits. La récolte est facilitée, avec un taux de tare terre moins important. Le gros avantage reste la standardisation du matériel pour les autres cultures sarclées, ainsi qu’une utilisation plus facile pour des outils pneumatiques. Parmi les inconvénients, on relève une perte de rendement de l’ordre d’un pourcent, ainsi qu’une couverture du sol à peine plus lente qui augmente le risque de devoir utiliser plus d’herbicides.
L’avantage est au semis à 50
Pour résumer ses essais réalisés en France, l’ITB constate qu’un écartement de 30 centimètres présente un intérêt sérieux sur la productivité, tout en admettant que d’autres essais sont nécessaires «pour confirmer». Si le resserrement de l’espace entre deux rangs entraîne un gain de productivité (rendement), «un tel changement peut néanmoins entraîner un surcoût de matériel de récolte, qui peut être difficile à rentabiliser», avance prudemment l’institut.
De fait, un semis à 50 centimètres offrirait, pour l’heure, «le meilleur compromis», selon Vincent Delannoy, notamment parce qu’il permet une standardisation des matériels entre cultures. «Un interrang augmenté de 5 centimètres entraîne une légère baisse de rendement, mais elle est largement compensée par les économies générées par une diminution de la tare terre et 10 % de temps de travail gagné», poursuit l’institut. A cela s’ajoute une récolte facilitée, notamment lorsqu’elle est réalisée par des arracheuses intégrales ; ce que présentaient déjà les résultats d’essais conduits dans les années 1990.
Prévenir la carence en bore
Des feuilles jaunes ou cassantes dans une parcelle de betteraves, et si c’était le signe d’une carence en bore ? Le bore est un oligo-élément indispensable à la betterave qui apparaît surtout en année sèche, «comme ce fut le cas en 2017», constate l’ITB. Les parcelles particulièrement sensibles sont celles où les sols sont faiblement pourvus, en impasse ou lors d’apports insuffisants. La carence en bore se manifeste par des feuilles extérieures jaunes et cassantes, présentant des craquelures perpendiculaires aux nervures. Les petites feuilles du cœur noircissent et meurent. La racine devient, quant à elle, liégeuse et présente des traces de pourriture sèche. La carence peut entraîner une perte de productivité de 30 % avec un effet sur la richesse pouvant atteindre - 1,42. Pour lutter contre la carence, il est donc recommandé de surveiller la teneur en bore du sol. En deçà de 0,5 ppm ou 0,5 g par kilo, on considère que le sol est carencé. Dans cette hypothèse, il est alors recommandé d’incorporer le bore avant le semis à raison de 1 à 2 kg/ha, puis d’effectuer un apport d’entretien pendant la phase de végétation à raison d’une à deux pulvérisations de 0,5 kg/ha.