Elevage bovin : des babynettes pour s’adapter à la demande du marché
Un nouveau marché a vu le jour ces dernières années, pour des génisses plus jeunes et plus légères. Couramment appelées babynettes, elles sont conduites comme des taurillons et abattues à 16-18 mois.
En règle générale, les génisses qui ne sont pas conservées pour le renouvellement du troupeau allaitant sont commercialisées juste après le sevrage, en maigre, et restent peu valorisées. De leur côté, les génisses de boucherie abattues à trente-trente-six mois semblent aujourd’hui ne trouver de débouché plus que dans les rayons des boucheries traditionnelles. Ces dernières années, les initiatives se multiplient autour d’une nouvelle voie de valorisation : des femelles abattues plus jeunes et donc plus légères.
Quel que soit leur nom : jeunes bovins femelles, génisses primeurs, génisses rajeunies, babyvelles ou plus couramment babynettes, elles séduisent de plus en plus les opérateurs.
«Poids, gammes, finitions…Il y a autant de définitions de babynettes que de clients, confie Jean-Luc Duret, directeur adjoint d’EMC2 Elevage. La coopérative qui a mis en place depuis 2018 une grille spécifique babynettes au-dessus des génisses de même poids. «Toutes les études le montrent : produire un animal plus léger, c’est possible. Mais ce n’est viable pour l’éleveur, que si le prix au kilo est revu à la hausse», insiste-t-il. La solution, ce sont donc les contrats de filière qui l’apportent.
Objectif RHD !
Ces babynettes-là se veulent destinées au marché français. Avec un secteur en ligne de mire : celui de la restauration hors domicile (RHD). La RHD, ce n’est pas que du bas de gamme. Les restaurants sont aussi demandeurs de carcasses légères, mais d’une viande grasse et maturée, aujourd’hui très souvent importée, en Angus, par exemple. «Dans ce cas, la race n’apparaît pas comme un critère déterminant. Il s’agit davantage de communiquer sur la qualité de la viande. C’est pourquoi, on peut se permettre d’introduire des croisées, explique Jean-Luc Duret. On n’est pas forcément sur des races “exotiques”. Le croisement charolais-salers fonctionne bien.» Les animaux issus de croisement vont en effet souvent donner une viande plus persillée.
Car c’est bien cela qui est recherché : le persillé. Soit le degré d’infiltrations de graisse se trouvant au sein même du tissu musculaire. Un persillé élevé rend la viande plus tendre, fondante, savoureuse et, aussi, plus riche en graisse. Une viande qui serait boudée par le consommateur s’il devait l’acheter crue, mais qui emporte tous les suffrages une fois cuite. C’est là tout le paradoxe :
la viande persillée est davantage appréciée dans l’assiette que dans la barquette. Idéale donc pour la restauration hors domicile.
«C’est l’une des principales difficultés sur ce dossier, reconnaît Jean-Luc Duret. Jusque-là on sait classer un animal par sa conformation, un état d’engraissement. Or, il n’y a pas de mesure officielle du persillé. C’est en cours. Car tant qu’il n’y a pas cela, on ne sait pas forcément derrière l’intégrer dans les objectifs de sélection.»
Une bonne technicité
Pour l’accompagnement de ses adhérents engagés dans cette démarche, EMC2 Elevage avance pas à pas. «On ne vient pas avec des recettes toutes faites, précise Jean-Luc Duret. On chemine avec l’éleveur, en assurant un suivi animal par animal. On commence à voir ce qui fonctionne et ce qui fonctionne moins. Nos adhérents ont souvent de bonnes surprises par le poids de leurs babynettes à l’abattage.» On constate en effet qu’il y a, sur ces types de viande, moins d’émoussage (l’étape qui consiste à retirer le gras de surface pour une meilleure présentation de la carcasse). Un bon point.
Cette démarche, qui reste encore novatrice, requiert une bonne technicité. Il est donc intéressant de le faire dans le cadre d’une coopérative. C’est une voie de valorisation qui peut apporter du revenu sans être sur un système trop complexe. En cela, elle répond aussi aux attentes des producteurs, s’avérant ainsi une vraie piste d’avenir.