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Moisson : qualité, volumes en baisse et rendements hétérogènes

C'est à l'issue d'une campagne culturale hors-norme, marquée par des épisodes contrastés de pluie et de sécheresse, que les moissons 2020 s'achèvent. Les rendements sont très hétérogènes et la production 2020 en recul par rapport à l'an dernier, mais la qualité est au rendez-vous.

On observe un important report de semis de blé tendre et d'orges d'hiver qui n'ont pas pu être réalisés : les surfaces d'orges de printemps sont en hausse de 19 % par rapport à 2019.
On observe un important report de semis de blé tendre et d'orges d'hiver qui n'ont pas pu être réalisés : les surfaces d'orges de printemps sont en hausse de 19 % par rapport à 2019.
© Jean-Charles Gutner

Le bilan de la moisson 2020 en France réalisé par FranceAgrimer, Arvalis-Institut du végétal et Terres Innovia débute par un constat simple et largement partagé qui explique en partie les résultats : les conditions d'implantation des cultures ont été «difficiles». Selon les secteurs géographiques, les écarts de rendement peuvent aller du simple au triple, quelle que soit l'espèce cultivée. La production 2020 est en net repli.

En céréales, les précipitations automnales particulièrement abondantes et fréquentes, ont rendu les conditions de semis difficiles voire impossibles. Avec un étalement inédit des dates de semis, le développement des cultures a été très variable sur le terrain. Sous l'effet de ces mauvaises conditions de semis et d'implantation, les surfaces cultivées ont fortement diminué en blé tendre (- 13 % par rapport à 2019) et en orges d'hiver (- 7 % par rapport à 2019) selon les données du service de la Statistique et de la Prospective du ministère de l'Agriculture et de l'Alimentation (SSP), au 1er août 2020. La sécheresse record qui a ensuite sévi au printemps, a généré des stress hydriques et dégradé les conditions de valorisation de l'azote. Les conséquences sur les rendements ont été variables en fonction notamment, de la précocité des peuplements et de la profondeur des sols. Le manque d'eau au printemps a néanmoins limité la pression maladie, à l'exception d'attaques de jaunisse nanisante en particulier sur les orges de printemps. Dans la plupart des cas, les récoltes se sont déroulées dans de bonnes conditions.

Blé tendre : protéines et PS au rendez-vous

La récolte de blé tendre touche à sa fin. La moyenne nationale des rendements s'établirait à 68,3 q/ha selon le SSP, en recul de 4 % par rapport à la moyenne quinquennale. On note cependant que l'hétérogénéité des rendements constatée chaque année est encore plus forte cette campagne, avec des rendements qui peuvent aller du simple au triple, voire plus. Les moyennes régionales sont globalement inférieures à l'historique mais quelques régions s'en sortent mieux : c'est le cas de la Normandie, des Hauts-de-France, du Grand Est et de la Bourgogne-Franche-Comté où les rendements sont proches voire supérieurs à la moyenne quinquennale. Les surfaces sont, quant à elles, en recul de 13 % par rapport à la moyenne des cinq dernières années. Selon les dernières estimations du SSP, la production atteindrait 29,7 Mt, en baisse de 17 % par rapport à la moyenne 2015-2019.

Sur le plan qualitatif, les teneurs en protéines devraient répondre aux besoins des utilisateurs des blés tendres français. Les moyennes régionales sont généralement supérieures à 11,5 %, voire 12 % sauf dans les Pays-de-la-Loire, en Normandie, en Bretagne et dans les anciennes régions Picardie et Champagne-Ardenne.

Dans la majorité des cas, l'absence de pluie jusqu'à la récolte a préservé le potentiel de poids spécifique élevé mis en place au moment du remplissage grâce au temps ensoleillé. La moyenne nationale devrait s'établir autour de 79-80 kg/hl.

Orges d'hiver : de très bons calibrages

Comme pour le blé tendre, les rendements moyens cachent une très grande disparité. En tendance, les valeurs observées sont en baisse par rapport à la moyenne 2015-2019, notamment sous la ligne Lorient-Strasbourg où l'on observe des récoltes très décevantes, particulièrement pour les semis les plus précoces. S'ajoute à cela une baisse des surfaces cultivées de l'ordre de 12 % par rapport à la moyenne quinquennale. La production est ainsi estimée à 7 Mt, en baisse de 22 % par rapport à la moyenne quinquennale.

Les teneurs en protéines majoritairement situées entre 10,5 et 11,5 % devraient satisfaire les utilisateurs brassicoles dans la plupart des cas. Les poids spécifiques sont corrects à bons selon un gradient Ouest-Est. Enfin, les calibrages sont très bons. Les régions brassicoles présentent des moyennes supérieures ou égales à 80 %, voire à 90 % (Champagne-Ardenne, Picardie et Poitou-Charentes).

Blé dur : qualité satisfaisante

Comme pour les autres céréales à paille, le blé dur affiche des rendements très hétérogènes quelles que soient les zones de production. Ils sont en net recul dans les bassins Sud-Ouest et Ouest-Océan, alors qu'ils sont proches de la moyenne dans le bassin Sud-Est et bons dans la région Centre. Malgré une légère hausse des surfaces en 2020 (+ 2 % par rapport à 2019), venant enrayer une tendance baissière, les surfaces restent nettement inférieures à la moyenne 2015-2019 (- 25 %). Ainsi, la production, annoncée à 1,3 Mt serait en recul de 28 % par rapport à la moyenne 2015-2019. Côté qualité, les teneurs en protéines sont correctes à bonnes, même très bonnes dans le bassin Ouest-Océan. Sous l'effet combiné de la génétique et de conditions favorables lors du remplissage des grains, le poids spécifique est satisfaisant (bassin Ouest-Océan et Sud-Est), voire bon (bassin Centre et Sud-Ouest) en dépit de pluies survenues en fin de cycle dans certains secteurs à l'Ouest et dans le Sud-Ouest. Pour les mêmes raisons, la collecte nationale devrait être majoritairement satisfaisante pour le temps de chute de Hagberg même si localement des accidents ont pu être constatés.

Orges de printemps : rendements en baisse

Malgré des rendements estimés en baisse par rapport à 2019, la production devrait atteindre 4,3 Mt (+ 37 % par rapport à la moyenne 2015-2019) sous l'effet d'une hausse des surfaces de 52 % par rapport à la moyenne quinquennale. On observe un important report de semis de blé tendre et d'orges d'hiver qui n'ont pas pu être réalisés : les surfaces d'orges de printemps sont en hausse de 19 % par rapport à 2019. Par ailleurs, les attaques de viroses (jaunisse nanisante de l'orge) ont été générales sur l'ensemble des bassins de production. En effet, les pucerons ont profité de conditions climatiques très favorables en automne et en hiver, et l'efficacité des traitements foliaires n'a été que partielle.

Des protéagineux impactés par la sécheresse

Malgré une hausse des surfaces, la baisse des rendements a limité la production nationale en 2020. Après une implantation des cultures difficile, les pois ont mal subi la longue période de sécheresse du printemps qui a freiné leur développement et limité la mise en place de nodosités. Les pois d'hiver implantés plus tôt ont pu bénéficier de conditions plus favorables.

L'année 2020 se caractérise surtout par une pression des ravageurs (sitones et pucerons) sans précédent, en particulier dans la moitié nord de la France, ce qui a réduit le potentiel des cultures. Du fait de leur jeune stade à l'arrivée des pucerons, les cultures de printemps ont été les plus impactées. Le retour des pluies n'a pas toujours permis une floraison et un remplissage corrects. Étant donné cette mauvaise conjoncture climatique et sanitaire, la récolte est décevante cette année sur l'ensemble du territoire à l'exception de certains secteurs (Hauts-de-France, Champagne). Globalement, les pois d'hiver ont mieux résisté.

Colza : des teneurs en huile meilleures que l'an dernier

En colza, anticiper les préparations était nécessaire pour réussir les semis et l'implantation des cultures dans un contexte de pluviométrie estivale réduite en août suivie de précipitations automnales soutenues. Si la surface cultivée en France atteint 1,1 Mha comme l'an dernier, l'évolution est plus contrastée au niveau régional. Le régime hydrique de l'automne et de l'hiver a, dans de nombreuses situations, altéré la qualité des enracinements rendant la culture moins apte à surmonter les attaques continues des ravageurs et plus sensible aux stress climatiques. La sécheresse marquée pendant la floraison n'a dans l'ensemble pas permis d'installer un nombre de siliques suffisant. Les maladies de fin de cycle ont pu localement perturber le remplissage des graines. La récolte est attendue à 3,3 Mt. Les difficultés d'implantation des cultures et la gestion de plus en plus difficile des ravageurs pour lesquels les solutions de contrôle manquent sont à l'origine d'une baisse des surfaces en Bourgogne, Lorraine et Champagne-Ardenne. Accentuées par un épisode de gel tardif, elles expliquent aussi les faibles rendements observés en 2020 dans les bassins Centre et Centre-Est de la France (25 q/ha en Bourgogne et 28 q/ha en Champagne-Ardenne). À l'Ouest (Bretagne, Pays de la Loire et Normandie) et au Sud, l'alternance d'excès d'eau hivernaux et de sécheresses printanières a empêché un développement performant du système racinaire. L'alimentation et la croissance de la plante ont été perturbées et la production affectée. Si la récolte s'avère globalement décevante, le colza a réservé de bonnes surprises avec des rendements corrects, par exemple au nord de la région Centre-Val de Loire et en Hauts-de-France. Les teneurs en huile sont en moyenne meilleures que l'année dernière et devraient être proches de 44 % de rendement aux normes.

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