Ras-le-bol ? La Fdsea appelle les agriculteurs à manifester !
Le conseil d’administration de la Fdsea dénonce la surenchère administrative, réglementaire et environnementale et appelle à manifester à Amiens le 5 novembre.
L’actualité ne manque pas en agriculture. Pourtant, pendant cette période des travaux d'automne, les agriculteurs s’en passeraient bien ! La Fdsea de la Somme s’est ainsi réunie en conseil d’administration le jeudi 16 octobre pour un tour d’horizon des sections et des derniers dossiers. En préambule, le conseil a entériné les modalités des cotisations syndicales pour l’année 2015, avec le maintien des remises pour les engagements reconduits selon le mode et la date de prélèvement, et un montant à l’hectare de 3,95 €.
Conjoncture morose
Avec un été médiocre, la moisson 2014 a été longue et s’est terminée difficilement. «La moitié des blés répondent au cahier des charges des acheteurs, l’autre moitié est de mauvaise qualité et il faut trouver un débouché», a expliqué Luc Vermersch, président de la section grandes cultures. A cela s’ajoute une chute des cours. Les prix de vente des produits de grandes cultures, céréales et pommes de terre en particulier, sont descendus à des niveaux très bas. En betterave, les rendements sont bons, ils tournent autour de 90-95 tonnes par hectare. Mais là encore, les prix ne sont pas au rendez-vous.
«En lait, le prix a été meilleur en 2014, mais les charges sont restées élevées. Cette année difficile nous montre l’importance de travailler et d'investir ensemble», a poursuivi Olivier Thibaut, président des producteurs de lait de la Somme. Le lait fait partie des productions concernées par l’embargo russe tout comme le porc, la viande bovine ou encore la volaille. «Pour la première fois, le prix du porc en Europe est le plus mauvais du monde», a précisé Jean-Michel Serres, anciennement président de la fédération nationale porcine. Et d’ajouter, «le coût de l’aliment n’a pas bénéficié de la chute des cours des céréales. Il ne baisse pas suffisamment». En viande bovine, même phénomène, les prix reculent. Pour la très grande majorité des exploitations, le revenu agricole 2014 sera très faible, voire nul.
«L'embargo russe montre la nécessité de disposer de véritables outils de gestion des marchés. Les outils actuels ne sont pas adaptés. Il est nécessaire de réviser les prix de déclenchement en tenant compte de l’évolution des coûts de production», a précisé Laurent Degenne, président de la Fdsea de la Somme. Et d’ajouter,«nous pouvons toutefois saluer le travail de la Ddtm de notre département puisque près de 99% des dossiers ont eu l’avance des aides Pac en octobre et ce n’était pas gagné d’avance». En effet, les doublons et la superposition dans le registre parcellaire de la couche végétation ont conduit à un surcroît de contrôles et d'anomalies en France. A titre indicatif, le pourcentage des exploitations ayant touché l’avance au niveau national s’élève à 90%.
Pour une application pragmatique de la PAC
La nouvelle PAC entre en application. Les agriculteurs de la Somme vont perdre beaucoup : en moyenne 30% de leurs aides avec de fortes disparités entre les exploitations. A cela s’ajoute une réglementation qui évolue et qui n’est que partiellement connue. Dans le cadre du verdissement des aides, les agriculteurs doivent avoir 5% de leur surface arable en surface d’intérêt écologique (SIE). Les modalités ne sont pas encore totalement connues alors que les semences sont d’ores et déjà commandées et que les emblavements ont débuté. «Les seules informations dont on dispose ce sont des diaporamas transmis à l’issue des réunions et quelques communiqués de presse de la part du ministère. Aucun document officiel n’est diffusé. Comment peut-on respecter la loi si on ne la connaît pas ? En 2015, nous exigeons une année blanche sur le verdissement de la PAC et une application pragmatique de celle-ci», a insisté Laurent Degenne.
Non au zonage directive Nitrates
Le contentieux européen sur la directive Nitrates conduit aujourd’hui la France à vouloir zoner la quasi-totalité de la Somme. «Les exigences de la directive Nitrates sont respectées dans notre département, pas un captage ne dépasse les 40 mg/L. Les taux stagnent voire s’améliorent, et pourtant nous sommes une nouvelle fois sanctionnés. On n’y comprend plus rien», a déploré Olivier Faict, responsable environnement à la Fdsea de la Somme. De fait, le nouveau zonage est basé sur le critère d’eutrophisation fixé à 18 mg/L, ce qui n’est qu’un critère statistique.
Le nouveau zonage touche plus de la moitié des éleveurs du département et 57% des vaches laitières. «Pour tous ces éleveurs, cela se traduit par l'obligation de réaliser des travaux de mise aux normes qui ne leur apporteront rien. En aucun cas, nous n’accepterons ce nouveau zonage. Comme nous l’avons déjà annoncé, nous viserons les stations d’épuration s'il n’est pas supprimé», a tonné Laurent Degenne.
Une action forte à Amiens
Aux difficultés économiques s’ajoute l'exaspération devant les contraintes administratives et réglementaires. Bref, les agriculteurs ont le moral dans les chaussettes.
A la mobilisation nationale lancée par la Fnsea et les Jeunes Agriculteurs pour le 5 novembre, la Fdsea répond présente. Le mot d’ordre est «laissez-nous travaillez !». Les revendications sont listées sous la forme de huit points (cf encadré ci-dessous). Xavier Beulin, président de la Fnsea, et Thomas Diemer, président des JA, ont d’ores et déjà porté ces revendications au Premier ministre lors de leur rencontre le 7 octobre. La Fdsea et la Frsea ont quant à elles rencontré la préfète de la Somme lundi 20 octobre pour porter ces revendications.
Dans la prochaine édition du journal l'Action Agricole Picarde vous retrouvez les modalités de cette manifestation qui se déroulera à Amiens le 5 novembre.
Les huit revendications de la Fnsea et des JA
1 - L’Union Européenne doit assurer la réparation économique des conséquences de l’embargo, et sur d’autres fonds que ceux de la PAC
2 - 2 plats sur 3 d’origine française dans la RHF
Et exiger des acteurs la promotion de l’origine France
Les engagements pris par les GMS et l’Etat lors de la réunion de juillet présidée par Arnaud Montebourg doivent être honorés :
• privilégier la mise en avant des produits français par les enseignes
• publier enfin les décrets de la «Loi Hamon» et concrétiser les contrôles et sanctions annoncés.
3 - Non au péage de transit
Et refus de toute hausse de taxes : énergie, phytosanitaires, eau
4 - Abandonner l’application du Compte pénibilité à l’agriculture
Et alléger les normes et les charges qui pèsent sur le travail :
• Lever les contraintes qui empêchent l’apprentissage des mineurs
• Maintenir les dispositifs existant d’exonérations de charges sociales sur les saisonniers
• Baisser immédiatement le coût du travail par la suppression des cotisations «famille et maladie» compensée par une TVA sociale
5 - Versement anticipé des aides PAC au 16 octobre pour tous
Et accompagner les trésoreries des exploitations :
• Augmenter les enveloppes de prise en charges des cotisations sociales et d’étalement sans pénalité des cotisations
• Mettre en place une couverture assurantielle de base pour toutes les exploitations et toutes les productions
• Disposer d’un dispositif d’épargne défiscalisée, la déduction pour aléas, adapté à chaque entreprise, plus simple et plus souple dans son utilisation
6 - Non au blocage des dossiers installation à partir du 1er janvier 2015
• Refuser tout retard du Ministère sur la parution des documents administratifs nécessaires au passage des dossiers en CDOA
• En région, finaliser les PDRR avant le 31 décembre 2014 en concertation avec la profession et respecter les cahiers des charges nationaux (PAI, CEPPP, stage 21h) et étudier l’ensemble des candidatures
• Maintenir les budgets qui permettent aux porteurs de projet de réaliser le dispositif d’accompagnement à l’installation (stages et formations PPP)
• Simplifier les transferts de DPB lors de l’installation d’un jeune entre le 15 mai 2014 et le 15 mai 2015
7 - 2015 : Une année blanche sur les contrôles verdissement/PAC
Et une application pragmatique de la PAC :
• Ne pas pénaliser les agriculteurs à cause du retard pris par l’administration sur les dispositions verdissement (pas de sanction pour non-respect de règles non connues lors des emblavements)
• Rendre les MAEC accessibles et applicables, en particulier en zones intermédiaires et polyculture-élevage
8 - Non au zonage directive nitrates tel qu’il est annoncé
Et du bon sens et des résultats en matière environnementale :
• l’Etat et les régions doivent accompagner la mise aux normes avec un plan ambitieux de modernisation des élevages
• Autoriser l’entretien efficace des cours d’eau
• Réduire par 2 les délais d’instruction et de recours sur les projets d’investissement (ICPE, méthanisation, stockage eau…)
• Ne pas appliquer de sanctions pour les porteurs de projet qui ne respecteraient pas leur PDE ou n’atteindrait pas le niveau de revenu minimum pour des raisons liées à la réglementation sur la directive nitrates.
• Une obligation de résultats pour les battues loups et sangliers