Paraclet : des étudiants se lancent dans l’aventure de la mini-entreprise
Depuis septembre dernier, onze élèves de première année BTSA Technico-commercial en productions
alimentaires et boissons ont créé une mini-entreprise
au lycée agricole.
Ils seront peut-être entrepreneurs demain. Mais créer son entreprise n’est pas une mince affaire et le chemin pour y parvenir est bien souvent semé d’embûches. Pour leur donner le goût d’entreprendre, depuis plus de dix-sept ans maintenant, l’association Entreprendre pour apprendre (EPA) dans les Hauts-de-France propose un parcours pédagogique à des jeunes, construit notamment sur la création d’une mini-entreprise. La classe de BTSA Technico-commercial en productions alimentaires et boissons, soutenu entre autres par leur professeur principal, Delphine Lieppe, a décidé de tenter l’aventure en créant sa mini-entreprise au lycée agricole du Paraclet.
Comme toute future entreprise, il a fallu répartir les rôles entre la direction générale, les finances, le marketing, la production, les ressources humaines et la partie commerciale. Etape suivante : le choix du produit à fabriquer et commercialiser. Après avoir visité plusieurs entreprises et réfléchi aux ressources présentes sur le lycée du Paraclet, les onze élèves du BTS sont tentés par la production d’un pâté. «Nous avons un élevage de cochons sur place, raconte Mathieu Quennehen, qui joue le rôle d’adjoint du directeur des ressources humaines. Mais nous n’avions pas le matériel nécessaire pour la fabrication. On a dû abandonner notre projet.»
La petite direction fait un nouveau brainstorming. Eurêka ! Elle jette son dévolu sur la production de gelée de pommes à partir des vergers du lycée agricole. Pour apporter une touche originale, elle ajoute à sa fabrication du safran. Et peut compter sur le savoir-faire de la tante d’Elodie Ledent, productrice de safran dans l’Oise. L’idée trouvée, il faut encore s’assurer de la viabilité du projet. «Nous avons fait une étude de marché pour analyser la concurrence, les tendances de consommation, les prix pratiqués, les cibles et les volumes à produire pour s’assurer que le produit que l’on souhaitait fabriquer puisse se vendre», explique Maureene Magniet, en charge, vous l’avez compris, de la direction commerciale.
Côté capital, il faut mettre la main à la poche. Celui-ci est monté à partir d’avances remboursables et d’un coup de pouce de l’association du Paraclet, «Axe travel». Soit un total de près de 500 €, de quoi couvrir à peine l’achat des pots et la réservation de la plate-forme de fabrication. Jordan Lefèvre, le monsieur finances de la mini-entreprise, établit les coûts de revient, le prix de vente, assure la gestion des avances remboursables, gère les factures et fait des simulations de vente.
Une histoire à rebondissements
Une fois les parties statutaire et financière en place, les quantités sont retenues. A partir de 70 litres de jus de pomme, les jeunes entrepreneurs tablent sur la production de cinq cents pots de gelée de pommes au safran de 200 gr chacun. Dès septembre, ils réservent la plate-forme où ils pourront fabriquer leur produit. Mais, avant, ils font des essais de fabrication dans les cuisines du Paraclet. «La plupart d’entre nous n’avons pas de formation scientifique. Aussi, la fabrication a été une sacrée paire de manches», dit Marion Escolan, directrice de production. Entre la gelée qui ne prend pas ou prend trop, les apprentis entrepreneurs s’arrachent les cheveux. Le ton monte. Panique à bord. Finalement, ils trouvent la solution. Mais les péripéties ne s’arrêtent pas là. Alors que la commande est passée pour les pots, leur livraison se fait avec retard. Coups de téléphone répétés et énervement garanti. Enfin, les pots arrivent. Ils vont pouvoir finaliser la production.
Il faut aussi fabriquer l’étiquette. C’est là qu’entre en scène le marketing. Elodie Ledent se tourne les méninges pour contacter différentes entreprises de fabrication de pots, retenir une forme de pot, puis créer l’étiquette, avec un design qui plaira à tous, un slogan et des affiches pour les recettes. «C’est super dur», avoue l’étudiante. Super dur, mais instructif et électrisant. Au final, trois sortes de gelées sont proposées : celle destinée pour accompagner les produits salés, celle pour le petit-déjeuner, et celle pour les préparations sucrées à base de pommes.
Les pots de gelée de pommes sont vendus au magasin du Paraclet, «qui ne prend pas de marge, précise Maureene Magniet. On voulait faire des marchés, mais nous n’avons pas assez de temps. Nous avons cependant organisé des ventes lors des Portes ouvertes du Paraclet et lors d’un marché du terroir au lycée Saint-Martin.» D’autres actions commerciales de même type pourraient être organisées.
Quelles que soient les difficultés traversées pour la création de leur mini-entreprise et les prises de bec entre eux, cette aventure «nous a appris à travailler ensemble malgré nos caractères et points de vue différents, comme à gérer une entreprise. Cela vaut vraiment le coup, même si nous n’avions pas à gérer du personnel et que l’on n’est pas du tout dans le rythme d’une entreprise», dit Renaud Jourdain, qui fait office de directeur général et de président de la mini-entreprise. Avis partagé par tous, ainsi que par leur professeur. «C’est une classe très dynamique qui avait vraiment la volonté de faire avancer son projet, et qui y est parvenue. Et chacun a trouvé sa place au sein du groupe», confirme Delphine Lieppe.
Entreprendre pour apprendre Hauts-de-France
Acteur incontournable de l’entrepreneuriat depuis plus de dix-sept ans, l’association met son expertise et son innovation au service du développement régional. Et distille l’esprit d’entreprendre tout au long de la scolarité des jeunes avec un parcours pédagogique construit notamment autour de la création d’une mini-entreprise. Cette année, 4 500 jeunes des Hauts-de-France se sont lancés dans l’aventure.
Le principe de la mini-entreprise est simple : les élèves sont invités à créer une entreprise grandeur réelle à l’école. Pendant des mois, leur tâche est de donner vie à l’idée qu’ils ont trouvée en début d’année scolaire, en franchissant pas à pas les marches de l’entrepreneuriat.
Aux côtés de ces mini-entrepreneurs, de plus en plus de grandes entreprises s’engagent dans leur accompagnement. Ainsi en a fait le Crédit Mutuel avec la mini-entreprise «J’M» du lycée agricole du Paraclet. Au total, ce sont dix-sept mini-entreprises qui ont bénéficié du parrainage de sociétés telles que la Redoute, Happy Chic, Cyrillus VertBaudet Group, la Fondation Crédit Mutuel ou encore le CIC.
Dans les Hauts-de-France, EPA a déjà sensibilité 32 700 jeunes à travers le programme des mini-entreprises. «30 % des jeunes sensibilisés deviennent un jour entrepreneur, précise Armaury Flotat, président des EPA Hauts-de-France. Notre objectif est d’inculquer à nos jeunes un état d’esprit pour qu’ils apprennent à être créatifs, audacieux et capables de s’adapter.» EPA implique également des entrepreneurs de la région. 170 entrepreneurs soutiennent ainsi ses différentes actions.